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N°17-18 novembre 2020-mai 2021 : Penser les savoirs géographiques à l'époque moderne (XVe-XIXe siècle):

Une géographie urbaine policière ? Expériences de terrain et formalisations de bureau d’un savoir sur l’espace urbain parisien au XVIIIe siècle

Nicolas Vidoni


Par Nicolas Vidoni (Maître de Conférences en Histoire moderne, Aix-Marseille Université,Telemme (UMR 7303) 



Résumé : Á partir de 1667, la police de la ville de Paris fut confiée à la Lieutenance générale de police de Paris, et ce jusqu’à sa disparition en 1789. Grâce à une multitude d’objets et de pratiques, l’institution produisit un savoir que l’on peut qualifier de géographique, sans que le terme fut employé à l’époque. Activité éminemment matérielle, la police de l’espace urbain visait à assurer la sécurité des biens, des personnes, mais aussi des rues et du bâti, ainsi que la propreté de la capitale. Les dispositifs d’occupation de l’espace permirent la production de connaissances sur la ville, à savoir des listes, des dénombrements, etc. qui trouvaient un prolongement dans l’assignation spatiale des choses et des hommes et femmes. De plus, l’expérience individuelle des agents sur le terrain fut formalisée dans des savoirs de bureau qui dessinèrent notamment une géographie de la criminalité qui n’avait rien de livresque. Enfin, et c’est là une originalité forte, la Lieutenance commanda un ouvrage de justification de ses prérogatives, le Traité de la police de N. Delamare, dont la démarche était géographique, puisqu’elle étudiait avant toute chose l’évolution de la topographie parisienne en recourant aux savoirs cartographiques les plus précis du temps. Une partie de ces connaissances fut diffusée au public (guides, plans, cartes) et aux autres administrations, dans le dessein d’améliorer le gouvernement matériel de la ville de Paris et pour justifier la prééminence de la Lieutenance générale de police.  



Mots clés : Paris, Lieutenance de police, cartographie, régulation de l’espace urbain. 



Abstract: From 1667 to 1789, the Lieutenance générale de police took charge of the material government of Paris. By the means of different objects and practices in urban space, the institution made a knowledge which can be qualified of geographic, while the word of “geography” was not used by the policemen.The police regulation of urban spaces was a material activity, and aimed to procure security for people and safety of the ways and the constructions. In a first time, the police spatial occupation of the town permitted to elaborate some knowledge about activities and human relationships. This knowledge was formalized by lists, by countings and other means. In a second time, this written knowledge permitted a spatial assignation of things and human beings. Moreover, the individual experiences of police agents was formalized by a bureaucratic process which produced a real criminal geography. But the main originality of the Lieutenance activity had been to command a treatise to justify its activities. It was the renowned Traité de la Police written by Nicolas Delamare, himself a “commissaire” of police. His intellectual approach was properly geographic, because he studied the topographic evolution of the town to justify the competences of the Lieutenance. In this way, he used the best cartographic knowledge of his time. And, it is the most important, his work was diffused to different publics, by the way of “guides” of Paris, by maps and plans. And, more confidentially, this geographic knowledge was also diffused to others administrations to make possible and to justify the material government of the capital of the kingdom.  



Key words: Paris, Lieutenance de police, cartography, urban spaces regulation. 



Au XVIIIe siècle, les guides pour les voyageurs venant à Paris reprenaient, pour un grand nombre d’entre eux, une présentation par quartiers de la ville (Chabaud, 1998, 323-345, Jèze, Jaillot, Le Guide parisien). Á cette fin, certains utilisaient le découpage en vingt quartiers de police. Or, il ne s’agissait pas là du seul découpage administratif de la capitale, puisque celui en seize quartiers municipaux perdurait (Descimon et Nagle, 1979, 956-983). La diffusion par ces guides d’un mode d’organisation de la ville à partir d’un découpage administratif, et ses traductions cartographiques, reposait sur le principe d’une appréhension de l’ensemble urbain par des sous-ensembles qui permettaient de changer d’échelle pour connaître, parcourir et vivre la ville. Ces découpages et cette appréhension de l’espace n’étaient pas neutres, et procédaient d’un mode de lecture de la ville spécifique à la police de la Lieutenance générale. Cette institution, créée en 1667, a longtemps été assimilée à la création de la police moderne. Il n’en fut rien, car elle avait, parmi d’autres institutions, la mission d’assurer la sûreté, la propreté et la commodité de la ville capitale. Á cette fin, elle mobilisa des savoirs urbains, mais elle fut également productrice de savoirs sur la ville à partir des pratiques spatialisées de ses agents dans les rues (Vidoni, 2018, 2e partie). 



Ce croisement entre une vision quelque peu abstraite de la ville, et une expérience policière multiple, déboucha sur des mises en forme plus ou moins achevées qui participèrent d’un processus de maîtrise de l’espace par sa connaissance, et fonda ainsi une démarche géographique de la police. Cette géographie policière prenait place dans un ensemble de pratiques administratives reposant sur une connaissance de l’espace (Margairaz, 2006), qui se distinguaient des savoirs plus scientifiques parcourus par la géographie (Nordman, 2010). La spécificité de ce savoir urbain policier peut être appréhendée par trois moyens. Le premier est celui des modes de production de connaissances sur l’espace, et leurs objectifs. Le deuxième est la formalisation plus ou moins aboutie, plus ou moins achevée, de ces connaissances, qui furent agrégées, filtrées, sélectionnées et triées en fonction de leurs usages. Enfin, ces usages ont déterminé des échelles d’utilisation de ces connaissances. En fonction de leur échelle, les savoirs policiers ont été diffusés à différents publics et selon différents modes, notamment le mode cartographique. 



I. La production de connaissances sur l’espace par la police



Les connaissances sur l’espace produites par les agents de la Lieutenance et l’institution reposaient sur un outil ancien d’appréhension de la réalité urbaine : les dénombrements. Ils permettaient d’assigner aux êtres humains et aux choses une place puis, dans une autre dimension, de remodeler la ville pour mieux la maîtriser. 



A. Les dénombrements



Le premier outil de production de connaissances sur l’espace consistait à compter la ville. Les commissaires du Châtelet, qui étaient les agents de la Lieutenance dans Paris, devaient, au cours de leurs visites dans leur quartier, relever les infractions, mais également établir des listes qui devaient permettre un meilleur contrôle des usages de l’espace. 



L’exemple le plus typique en fut la recension des aubergistes, hôteliers et autres tenanciers de lieux d’accueil. Ils constituaient une population hautement suspecte aux yeux des agents de la police, parce qu’elle était susceptible de retirer les individus les plus mal famés (Milliot, 2006). Mais, inversement et paradoxalement, les Lieutenants généraux ont constamment tenté d’en faire une catégorie spécifique d’informateurs, soit par la menace, soit en les rétribuant (ms fr. 21710, 237-239). On sait que pour cette raison, les commissaires devaient enregistrer tous les lieux d’accueil de leur quartier et les contrôler régulièrement (ms fr. 16847, 126), y compris dans les lieux privilégiés tel que l’Enclos du Palais (JdF 1418, 129). De plus, à partir de 1708, les inspecteurs de police nouvellement créés pour parcourir les quartiers furent spécialement affectés à la surveillance de cette profession et de ces espaces. 



Par ailleurs, les commissaires dénombraient les lanternes, et conséquemment les maisons, afin de fixer la taxe des boues et des lanternes (ms fr. 21695). Ils perpétuaient une pratique usitée au sein du Châtelet avant la création de la Lieutenance de police, les dénombrements de 1663, 1668, 1670 et 1673 étant conservés (ms fr. 21695, 238-279). Ces comptages n’allaient pas sans difficultés, qui tenaient dans l’appréhension de la réalité urbaine. Ainsi, outre la question de savoir ce qu’il fallait dénombrer et comment (les maisons à porte cochère ou non, les maisons à enseigne, les cabarets et/ou les chambres garnies…) la définition même d’une « maison » pouvait varier. De la sorte, en 1683, un commissaire se présenta aux maisons des communautés religieuses de son quartier pour connaître leur état (nombre et qualité des religieux-ses, activités…). Les responsables de ces dernières s’en plaignirent, au nom de leur privilège, ce que récusait le commissaire qui considérait qu’en tant qu’usagères des rues, elles devaient et pouvaient contribuer à la taxe. De plus, les cadres territoriaux des dénombrements pouvaient varier, celui de 1670 ayant distingué les faubourgs des dix-sept quartiers de police, ce que ne faisaient pas les précédents qui conservaient le cadre des seize quartiers municipaux dans lequel la taxe était traditionnellement perçue. 



Par ailleurs, ces dénombrements étaient menés à différentes échelles, de la rue ou d’un micro-espace à la ville, par exemple lorsqu’il s’agissait de dénombrer toutes les maisons et leurs occupants par quartier en 1707 (ms fr. 21710, 237), les boulangers du cimetière Saint-Jean en 1723 (APP Lamoigon 27, 238), le nombre de rues par quartiers en 1729 (JdF 1410) ou le nombre de revendeurs présents dans Paris en 1756 (Milliot, 2005, 352). 



Cette dernière échelle resta pourtant exceptionnelle. En effet, les pratiques reposaient sur une connaissance individuelle, personnelle et sensible de l’espace urbain, et ce type de chiffre global ne pouvait être obtenu que par l’agrégation de chiffres dispersés, ce qui était généralement pratiqué dans les bureaux. Mais avant d’examiner ce point, quelle était la finalité de ces dénombrements ?



B. L’assignation spatiale des hommes et des choses



La première finalité était fiscale. Le dénombrement permettait d’évaluer les capacités contributives des quartiers, puis de répartir la taxe des boues et des lanternes entre les habitants. Ce processus échappait en partie à la Lieutenance, puisque cette répartition se faisait en accord avec les bourgeois et les principaux habitants réunis par le commissaire de quartier.



La finalité proprement policière de ces dénombrements consistait à assigner aux hommes et aux choses une place dans l’espace, sans que la pratique du comptage débouche automatiquement sur cela, puisqu’ils pouvaient simplement enregistrer la place des individus dans la ville (c’est le cas pour les boulangers du cimetière Saint-Jean cités précédemment). Trois exemples, l’un idéal et les deux autres bien réels, permettent de comprendre les mécanismes policiers à l’œuvre.



Au cours des années 1740-1760, le nombre de carrosses dans la ville et de chaises à porteurs augmenta considérablement (Roche, 2000). Face aux embarras causés, et à la dangerosité « naturelle » des conducteurs de coche, violents, ivrognes et peu respectueux des hiérarchies sociales (Peuchet, art. « cocher »), les inspecteurs ont procédé au dénombrement de tous les carrosses (Arsenal, ms 10281). Pour mieux les contrôler, une place leur a été assignée dans chaque quartier pour attendre les clients. Cette place était marquée par une fleur de lys. Il ne subsiste aucune liste exacte de ces carrosses dans les archives des inspecteurs, mais ils étaient enregistrés dans les bureaux de la Lieutenance par leur numéro d’immatriculation, ce qui mettait en correspondance la réalité urbaine et la connaissance de papier que l’on pouvait en avoir (BHVP, CP 4725 et Peuchet, « charretiers »). 



En 1784, sur un espace plus réduit, et pour lutter cette fois strictement contre les embarras et faciliter la circulation (selon la pensée fonctionnaliste du temps), on attribua aux revendeurs d’oranges sur le Pont-Neuf une place, qui était également enregistrée par le commissaire du lieu, Dorival (AN, Y 12526). 



Enfin, mais cela resta un projet au midi du siècle, l’officier de maréchaussée Guillaute envisagea d’enregistrer toutes les maisons, et tous les appartements au sein de ces maisons en fonction de leur position dans les quartiers, dans les rues, dans les immeubles et par étage (Guillaute, 1974). Ce projet de Guillaute était fondé sur la politique de dénombrement des rues et d’enregistrement de leur nom, complétée sur le terrain par l’apposition d’inscriptions puis de plaques avec leur nom et leur numéro, menée depuis la décennie 1720-1730, aussi bien dans Paris que dans ses faubourgs. 



Finalement, la connaissance de l’espace permettait, par l’assignation d’une place aux hommes et aux choses, d’en réguler les désordres par une maîtrise des emplacements. Cette maîtrise visait bien à fluidifier les flux et à dégager les rues pour permettre une plus grande mobilité. Évidemment, ce mode d’appréhension de l’espace restait incomplet et butait, très largement, sur l’imprévisibilité des mouvements, mais il participait, chez certains agents de la police, d’une volonté de tout connaître pour tout contrôler, et pas seulement par la vision (Foucault, 2004). Cette connaissance de l’espace urbain pouvait également servir, exceptionnellement, à remodeler les découpages administratifs pour rééquilibrer la ville. 



C. Remodeler et rééquilibrer la ville



En 1667, au moment de la création de la Lieutenance, un personnel judiciaire et policier existait déjà, composé par les commissaires du Châtelet répartis dans les seize quartiers municipaux, ou dans les dix-sept quartiers de police. L’incertitude quant au découpage strict tenait aux limites dans les faubourgs, le faubourg Saint-Germain ayant été subdivisé en deux quartiers de police selon Nicolas Delamare, auteur du Traité de la police, pour adapter la répartition des officiers à l’extension urbaine faubourienne (Delamare, 1705, 91). 



Les quartiers de ville apparaissaient mal adaptés à la mission de la Lieutenance qui était d’assurer un nettoiement quotidien des rues par le moyen de charrettes transportant les déchets amassés chaque matin par les habitants au-devant des maisons. Pour rendre plus efficace ce nettoyage, d’Argenson, nommé Lieutenant en 1697, s’attela à réformer les quartiers. Il ne s’agissait pas du premier projet de refondation des quartiers, puisque le Conseil de réformation de la police l’avait initié en 1666-1667 sans qu’il n’aboutisse. L’originalité de la démarche de d’Argenson tenait dans le fait qu’il s’appuyait à la fois sur les dénombrements des maisons effectués par les commissaires et sur les estimations du Contrôle général, au sein duquel il avait officié sous les ordres de Pontchartrain. En 1694, il avait été saisie de la question de la taxe des boues, et son avis avait été de rééquilibrer le nombre de maisons entre les quartiers (ms fr. 21688, 81). 



Il reprit cette idée en accédant à la Lieutenance, et compléta sa connaissance de l’espace urbain en utilisant des plans réalisés par Nicolas de Fer. La déclaration royale de décembre 1702 qui créait les vingt nouveaux quartiers reprit d’ailleurs l’idée que le roi, après s’être fait représenter le plan de la ville, estimait nécessaire de revoir le découpage pour rééquilibrer le nombre de maisons et de rues (ms fr. 21684, 27). Cette assertion est confirmée quand on scrute les plans de Nicolas de Fer, l’un prospectif (De Fer, 1694), l’autre marquant le résultat de ce découpage (De Fer, 1701). 



Par cette démarche, la connaissance de l’espace urbain, et la connaissance numérique des éléments qui composaient cet espace, fondaient le processus de remodelage des quartiers policiers. Pour autant, il ne s’agissait pas d’un fait absolument nouveau, puisque l’Hôtel-de-Ville avait procédé à un recensement exhaustif des personnels et des équipements urbains lors de la modification des seize quartiers municipaux en 1683-1684 (ms fr. 22387 et 22388). Mais à cette occasion, le critère du nombre de maisons n’apparaissait pas aussi structurant. De plus, le redécoupage des quartiers municipaux devait s’appuyer sur un plan, celui de Bullet et Blondel, mais on ne sait si celui-ci a été réalisé.  



L’originalité du travail de la Lieutenance semble donc tenir dans le fait que l’outil cartographique a été mobilisé tout au long du processus de réformation des quartiers, ainsi que la prise en compte du nombre de maisons. Un des critères qui n’a pas structuré ce découpage est le critère démographique, qui n’a été utilisé que plus tardivement, en 1762-1763. 



En 1762-1766, une nouvelle Halle aux grains fut bâtie à l’emplacement de l’Hôtel de Soissons. Ouverte le 12 janvier 1767 par le Lieutenant général Sartine (AN, H 2157), elle a nécessité un réaménagement de l’ancien quartier de Saint-Eustache (BnF, JdF 1425 et AN, H 2157, Dussaussoy, 1767, chap. 2), puisque la forme circulaire de la Halle imposait désormais une circulation giratoire empêchée par le lacis des anciennes rues. Cet aménagement, induit par le déplacement de la Halle aux grains depuis le quartier des Halles, reconfigura l’espace urbain du cœur de la ville. Or, le Lieutenant général Sartine souhaita rectifier les limites de ces quartiers, afin de conserver l’inspection de la Halle au commissaire de Machurin qui en avait la charge avant le déplacement et le changement de quartier. En 1765, un projet d’ordonnance royale pour modifier les limites des quartiers de police fut rédigé en relation avec le Contrôleur général. Son préambule indiquait que 



Sa Majesté étant informée que par l’agrandissement successif de Paris, et par les différents changements qui y sont arrivés depuis le commencement du siècle, ces quartiers sont devenus très inégaux dans leur étendue, et par le nombre d’habitants qu’ils contiennent ; que quelques uns sont composés d’un petit nombre de rues et peu peuplés, pendant que d’autres contiennent un très grand nombre de rues et un peuple considérable, ce qui rend plus difficile le service des officiers de police (ms fr. 22153, 75).



Ces considérations mettent en relation le « nombre » de population avec l’espace, et introduisent une appréhension de la ville par les densités de population sans traduction chiffrée. La Lieutenance générale complexifia à cette occasion sa lecture de l’espace, et le fit sans doute à partir de l’expérience de terrain que le Lieutenant, les commissaires et les inspecteurs pouvaient avoir. Les rapports nombreux de l’inspecteur Poussot et du commissaire Machurin, du quartier des Halles, signalaient fréquemment combien les rues, les maisons et les alentours des marchés étaient surpeuplés et sur occupés (Kaplan, 1988 ; pour les rapports de Poussot à Sartine, Arsenal, ms. 10141). Dans le même temps, les agents de la Lieutenance étaient tenus de collecter auprès des curés des paroisses des états de baptêmes, mariages et sépultures, ce qui donne à penser qu’une démarche démographique pouvait guider les réformes urbaines du Lieutenant. 



Le projet prévoyait une redéfinition des limites des quartiers, hormis celui de la Cité, pour tenir compte de l’étalement urbain intervenu depuis 1702. Les quartiers centraux seraient élargis sur les quartiers périphériques, et ceux-ci repoussés vers les nouvelles « limites » de la ville, tout en conservant le nombre de vingt quartiers. 



Le découpage de 1765 ne semble pas avoir été réalisé. Un document préparatoire à la réforme des quartiers de police voulue par le Lieutenant général Albert et Turgot en 1776 (AN, Q1 1133) le montre. Il indiquait que « le Sr Moithey ingénieur géographe du Roi », en relation avec les commissaires des quartiers, avait dressé un état des rues de chacun des vingt quartiers, mais ne savait pas où passait la limite entre les quartiers Saint-Eustache et des Halles. 



Les plans de l’époque ne permettent pas de trancher cette question. Le Plan général de la ville et faubourgs de Paris divisé en ses ving [sic] quartiers réalisé par Desnos en 1761 séparait les quartiers des Halles et Saint-Eustache par la rue de la Tonnellerie et par les piliers des Halles (Desnos, 1761). Or, un plan du même, datant cette fois de 1775 (Desnos, 1775), entérinait la réforme des quartiers initiée par Sartine en déplaçant la limite à la rue d’Orléans, mais sans enregistrer les modifications urbanistiques induites par l’édification de la Halle ! Qui faut-il donc croire ? Les commissaires, chargés en 1776 de contribuer à la redéfinition de leur quartier en donnant des informations sur le terrain à Moithey, et qui pouvaient être tentés de protéger leur juridiction ? Les cartographes, qui avaient auparavant figuré des modifications administratives ? Ou les deux, dans la mesure où le doute pouvait être imputable au caractère temporaire d’une mesure hors-cadre, mais qui apparaissait comme logique au moment de son application de par la finalité avant tout pratique qu’elle poursuivait ?



L’ensemble de ces éléments révèle que la Lieutenance, par ses pratiques de terrain, produisit des connaissances sur l’espace qui étaient organisées dans le but d’agir à différentes échelles et selon différents objectifs, pratiques ou abstraits. Mais ils révèlent aussi combien ces savoirs sur l’espace parisien restaient incertains, tant dans leur assise intellectuelle que dans les effets qu’ils pouvaient produire sur la territorialisation des pratiques policières. Cette connaissance géographie policière doit donc être questionnée dans les processus de formalisation qui l’ont traversée et affectée. 



II. La formalisation de ces connaissances



La première mise en forme de ces connaissances passa par un outil commun à de nombreux savoirs sur l’espace, la liste. Ce n’est que par les usages qui en découlèrent que ces savoirs sur l’espace furent mis en tableau puis diffusés (Verdier, 2015). 



A. L’outil premier : la liste



Le premier outil utilisé par les agents de la Lieutenance ne leur était pas propre. Il s’agissait de listes, qui recensaient et classaient des objets très divers. Cela allait du nombre de lanternes par rue et quartiers, à la liste des bornes qui marquaient la limite de la ville, aux listes de rues qui composaient l’espace urbain parisien. De manière générale, elles étaient structurées selon un classement par quartiers qui reprenait le mode d’appréhension policier de la ville. 



Ces listes portaient à la fois sur les pleins (les bâtiments) et les vides (les places, les rues, les terrains non-construits), et s’intéressaient encore aux activités et aux modes d’occupation de l’espace. Leur but était de connaître l’espace urbain pour en maîtriser la complexité et l’appréhender dans sa globalité et dans son détail. Elles ne différaient pas sensiblement des listes que les autres administrations pouvaient produire (Margairaz, 2006, 190). Un seul type de listes policières semble avoir eu une visée plus complexe. Il s’agit des listes relatives au mobilier ou à l’équipement urbain. 



Lors du Conseil de réformation de la police de 1666-1667, des listes des fontaines, qu’elles soient publiques, privées ou appartenant à des communautés, ainsi que de ceux qui les utilisaient, avaient servi à vérifier la pertinence du découpage des quartiers (ms fr. 16847, 70-98). Elles étaient complétées par la liste du montant de la taxe des boues par quartier, et permettaient de redessiner les limites pour faire concorder l’écoulement des eaux et le ramassage des ordures. 



Quelques années plus tard, dans la politique monarchique de lutte contre les incendies, les ordonnances de police, à partir d’un mémoire rédigé par Beausire, maître général des bâtiments de la Ville de Paris (ms fr. 21681, 17-26), portèrent l’obligation d’indiquer au coin des rues les lieux où les pompes à incendie étaient entreposées (ms fr. 21681, 36). Elles complétaient les listes conservées dans les bureaux de la Lieutenance, ainsi que les listes des maçons et charpentiers dans les quartiers que les commissaires devaient mobiliser en cas d’incendie. Il s’agit ici d’un des premiers cas de listes qui étaient à la fois l’outil pour connaître l’espace urbain et son équipement, mais encore un outil pour agir dans l’espace parisien. Elles étaient, à cette fin, rendues publiques pour permettre à la population d’agir sans attendre l’arrivée des secours de la puissance publique. 



On constate de la sorte que cet instrument classique de connaissance de l’espace, qui était utilisé très largement dans les livres de géographie (Verdier, 2015), trouvait par les dispositifs policiers une utilité pratique et publique qui en démultipliait la diffusion. Cette géographie administrative, en ce sens, était bien l’outil qui permettait à la Lieutenance d’agir dans la ville et d’impliquer la population. Elle pouvait être prolongée par une mise en tableau des informations recueillies. 



B. La mise en tableau



Les bureaux de la Lieutenance ne furent organisés strictement que dans la première moitié du XVIIIe siècle (Milliot, 2011, 196 et suiv.). Auparavant, le commissaire Delamare recueillit un grand nombre de documents pour constituer la matière de son Traité de la police. Ses archives révèlent qu’il organisa sa connaissance de l’espace parisien par le recours à des tableaux à différentes échelles. D’une part, il confectionnait lui-même des tableaux pour présenter l’équipement de son quartier – la Cité – lorsqu’il devait rendre compte de l’état de son territoire. 



D’autre part, et ici en tant que compilateur des données produites par ses collègues, il agrégeait l’ensemble des données pour mettre en ordre les connaissances sur l’espace en vue de le connaître et le maîtriser. Cette opération est nettement visible dans le cas des rues de la ville (ms fr. 21695). L’objet était important, pour plusieurs raisons, mais surtout parce que la rue était l’objet premier de l’attention policière. Dans le dernier tiers du XVIIe siècle, la taille de la ville préoccupait grandement les autorités monarchiques, car l’extension du bâti représentait un danger dans la pensée policière sur l’espace. Delamare, mais encore Guillaute plus tard, voire Sartine et Lenoir à la fin du XVIIIe siècle, craignaient par-dessus tout les effets du « gigantisme » urbain. Il puisait pour cela à l’exemple de la Rome antique, qui devait sa chute à l’excès de sa grandeur. Á cette fin, Delamare réalisa un tableau de toutes les rues de la ville, avec leur « aboutissement » et les rues qui les croisaient (ms fr. 21695, 2-94). Il le compléta par sa connaissance historique et topographique de la réalité urbaine parisienne qui lui permettait de montrer l’évolution dangereuse du périmètre urbain par l’accroissement du nombre de rues et par leur étirement au-delà des limites de la ville. 



De la sorte, la finalité de l’établissement de ces tableaux s’enrichissait. Ils permettaient de connaître les limites pour empêcher les constructions au-delà des bornes posées à la fin des rues, et situer ces bornes pour agir en situation (Vidoni, 2017). Ce processus de formalisation a connu une nouvelle étape avec l’organisation de la Lieutenance en bureaux spécialisés à partir des années 1730-1740. 



C. Le travail de bureau 



Les archives des bureaux de la Lieutenance ne sont pas conservées intégralement, ni dans un lieu unique. On ne connaît d’ailleurs précisément l’organisation de ces bureaux qu’à partir des années 1750 et la Lieutenance de Berryer (Milliot, 2011, 196). Un document de 1753 nous apprend ainsi que l’institution policière était composée de neuf bureaux qui centralisaient les informations reçues des différents quartiers (BHVP, CP 4725, 32 et suiv.). Le quatrième bureau traitait par exemple des voitures publiques, des lanternes et des boues, le sixième des cabarets et limonadiers et le huitième de la voierie, raison pour laquelle il centralisait les recensements des enseignes. Dans ces bureaux, une mise en ordre de la masse d’informations reçues consistait à assembler en tableaux les données de terrain. Cette mise en ordre obéit de plus en plus fréquemment à un « esprit de formulaire » (Milliot, 2005, introduction), qui visait à homogénéiser la forme et le fond des documents produits sur le terrain. Le but de cette formalisation croissante était d’éviter que les commissaires, ou les agents de la Lieutenance, ne recensent des éléments différents lors d’une même enquête, ou de façon disparate qui ne permettrait pas l’agrégation des données, tel que cela s’était produit dans les années 1670 pour la taxe des boues et des lanternes. 



Dans ce domaine, on distribua alors des petits registres in-octavo aux commissaires, qui leur permettaient de connaître le montant de la taxe des boues et lanternes. Ces registres pouvaient être mis en relation avec des plans qui étaient conservés dans les bureaux de la Lieutenance. L'exemple le plus révélateur est relatif à la nouvelle Halle aux grains. Un registre conservé à la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris contient la mention « ce plan et toutes les évaluations […] n’ont été faittes que par le gouvernement », ce qui signifie qu’il avait vocation à rester secret (BHVP, CP 4821). Deux types de tableaux l’accompagnaient. Le premier était structuré par « Maisons, ilot, numéro et rue ». Le second détaillait plus précisément la structuration et l’organisation des maisons, en indiquant le toisé, le nombre de pièces et leur fonction, la répartition des pièces entre le « bout » et les « caves », et enfin le « prix » des pièces qui déterminait le montant de la taxe. Ces deux tableaux concordaient, par la numérotation, avec le plan de Le Rouge de 1763 (Le Rouge, 1763). Ce dernier donnait un aperçu général qui englobait d’un coup d’œil le détail des rues et des maisons, et permettait aux hommes de bureaux d’apprécier la réalité des situations par les « observations » qui pouvaient être rédigées par les agents de terrain. De la sorte, l’estimation conservée pour l’année 1775 donna un rapport de 229 842 livres, ce qui fixait le niveau de richesse estimé pour permettre la répartition de la taxe. 



De fait, les processus de formalisation permettent de mieux comprendre la confluence entre les expériences de terrain des agents, leurs pratiques d’appréhension de la réalité urbaine à partir d’éléments identifiés et utiles pour le travail de la police, et la vision panoptique ou globale que les administrateurs retiraient de l’ensemble de ces connaissances. La reformulation opérée par le moyen des listes, des mises en tableaux et par la cartographie permit ainsi une centralisation de la décision et une rediffusion aux agents dispersés pour agir dans la ville en connaissance de cause. Cette diffusion fut, au siècle des Lumières, élargie à d’autres publics. 



III. La diffusion de ces connaissances



La production et les usages de ces connaissances sur l’espace parisien ont conditionné leur diffusion. Certains documents relevaient du secret découlant de la raison d’État et n’étaient diffusés qu’à l’intérieur des arcanes administratives. Mais d’autres documents se situaient à la confluence de plusieurs environnements, notamment parce qu’ils participaient d’un processus d’affirmation des compétences de la Lieutenance. 



A. La diffusion aux agents de la Lieutenance et aux autres administrations



Les listes produites par les agents de la Lieutenance furent diffusées au sein de la Lieutenance, du bas vers le haut puis du haut vers le bas, en vue d’orienter les pratiques dans l’espace parisien. 



De la sorte, les procès-verbaux des commissaires, dès la fin du XVIIe siècle, dessinaient une géographie de la criminalité, sans que le nom n’apparaisse, qui pointait la dangerosité des faubourgs. Cette dangerosité était due à la nature juridique extraordinaire de ces espaces, mais également aux usages qui en étaient faits par la population, notamment par la présence des cabarets. Cela constitua un véritable topos policier, qui détermina d’Argenson à y envoyer des hommes à lui, non-officiers, pour y surveiller des lieux suspects, spécialement les débits de boisson, antienne que Lenoir reprit plus de soixante ans plus tard dans ses mémoires et que les traités de police continuèrent de véhiculer (ms fr. 8058, La Poix de Fréminville, art. « Cabaretiers »). Elle justifia en partie le découpage de 1702, qui prévoyait d’étendre le territoire juridictionnel des quartiers périphériques intra-muros au-delà des boulevards pour y inclure les faubourgs. Les informations furent alors transmises au Contrôle général, qui travailla main dans la main avec la Lieutenance, et qui fut même à l’origine du projet de création des inspecteurs de police (AN, G7 704). Mais cette connaissance de la géographie parisienne ne resta pas cantonnée à l’institution policière.



Le cas du Traité de la police de Nicolas Delamare apparaît en effet plus complexe (Dyonet, 2017). Le commissaire de la Cité fut sollicité dès les années 1680 pour rédiger une compilation des règlements de police, mais il dépassa ce seul projet pour proposer un véritable Traité qui justifierait la police monarchique de la Lieutenance face aux autres institutions, et qui assoirait auprès du public sa renommée de commissaire érudit. Reprenant la méthode mauriste de compilation des documents, il tira des ouvrages d’histoire et de sa fréquentation de Nicolas de Fer un substrat spatial à sa pensée. Cela déboucha, naturellement, sur la production de plans, au nombre de huit, qui donnaient à voir l’extension topographique de la ville de Paris depuis l’époque de Lutèce. La forme parfaite, en cercle, avait été atteinte à l’époque de Philippe-Auguste, qui réunit les deux rives de la Seine. Depuis cette époque, l’incapacité de la monarchie à limiter le bâti à l’extérieur mettait en danger l’équilibre policier, et Delamare voulait le montrer au public. Son continuateur Leclerc du Brillet fit de même, et ils demandèrent à Nicolas de Fer, qui réalisait les plans, de figurer nettement les limites pour informer le public et ainsi empêcher l’extension du bâti (ms fr. 21694, 40). De la connaissance géographique, Delamare passait non seulement à un discours public, mais plus encore permettait l’action administrative en mobilisant un public capable d’entendre et de comprendre la nécessité de cet interdit. 



La réelle force de l’ouvrage de Delamare fut, ainsi, d’asseoir sa compilation sur un soubassement proprement géographique et dynamique, qui fut mis en image et donné à voir. Cette mise en carte était exceptionnelle pour l’époque, bien que les guides y aient recouru, en particulier par les perspectives historiques qu’elle incluait qui justifiaient les politiques policières dans l’espace urbain. L’outil cartographique resta d’ailleurs, tout comme dans les autres savoirs géographiques du temps, exceptionnel. 



B. La mise en carte policière de Paris



Enfin, dans cet ensemble de savoirs sur l’espace parisien, et dans ces réflexions en partie géographiques, la police recourut, pour diffuser ses lumières, à l’outil cartographique, mais jamais de manière exclusive. Un exemple exceptionnel peut être retenu. 



Il s’agit de l’ouvrage produit par Jean De La Caille en 1714. Sa Description de la ville et des faubourgs de Paris en vingt planches figurait chacun des quartiers nouvellement créés et donnait à voir le grand-œuvre de mise en ordre de l’espace parisien, mais constituait en même temps un outil d’information et de connaissance de cet espace (La Caille, 1714). Il était composé d’un plan général de Paris, sans figuration des limites des quartiers, et de vingt planches particulières à chaque quartier. Le découpage en quartiers isolés permettait de montrer la mise en ordre d’un espace immense et considéré comme désordonné offert au regard du lecteur par le plan d’ensemble. Á côté des limites étaient mentionnés les objets qui occupaient le regard et l’esprit policier : des équipements (abreuvoirs, barrières, lanternes, puits…), des lieux (les rues, les places, les culs-de-sac, les marchés), le nombre de maisons et les lieux remarquables, qui correspondaient aux principaux bâtiments décrits dans les guides du temps : les églises, les cimetières et autres lieux importants. 



Deux types de classements organisaient l’ensemble des informations. D’une part, une liste par ordre alphabétique de tous ces objets, qui répondait aux canons de classement du monde dans les ouvrages de géographie. D’autre part, un « dénombrement des rues du quartier, avec leurs aboutissemens » et en regard de ces rues classées par ordre alphabétique un dénombrement des maisons et des lanternes publiques. De la sorte, l’ouvrage donnait à voir et à lire l’immensité de la ville, les éléments innombrables qui la composaient, et la mise en ordre policière qui permettait de l’appréhender de manière certaine et rassurante. 



Ce type de production, assurée par l’imprimeur de la police, avait pour but de vanter l’action de la monarchie en matière de police de la ville, et mobilisait pour cela les codes géographiques du temps. Mais il avait encore pour finalité d’être diffusé aux commissaires du Châtelet pour leur permettre de mieux connaître leur territoire. Le propos liminaire indiquait ainsi : 



afin qu’il soit plus facile à Messieurs les Commissaires & aux Inspecteurs de Police d’y faire observer les mêmes règles, & d’assurer l’exécution des ordonnances du Roy dans l’estendue de leur département commis à leurs soins ; M. Dargenson a désiré qu’on gravât séparément les Plans, & qu’on y joignit une description exacte des maisons, des rues, des lanternes qui les éclairent (La Caille, 1714, 7).



On ne sait rien de la réalisation de ce dessein, tout comme on ne connaît pas le tirage et la diffusion réelle de cet atlas. Il constitua pourtant une exception, car aucun autre document cartographique aussi complet ne fut produit par la suite. 



Conclusion



Les savoirs sur l’espace urbain produits par la police furent marqués, avant tout, par leur aspect utilitaire. Ils avaient pour finalité de fournir un instrument de connaissance des objets composant la ville, aussi bien les maisons que l’équipement urbain ou les activités. Il s’agissait, pour cette raison, d’un savoir éminemment pratique (Margairaz, 2006, 195), qui reposait sur l’expérience de terrain de chaque agent dans la ville. Les informations produites par ces agents, principalement des listes, pouvaient subir une mise en forme plus poussée au sein des bureaux. Ce savoir était alors un savoir de compilation qui n’informait pas réellement sur l’espace lui-même. Parallèlement à ce processus, une pensée de l’espace née sous l’effet de l’extension urbaine s’insinua au sein de l’institution par les travaux de Delamare. Elle trouva à s’exprimer sous d’Argenson, dont la Lieutenance constitua un moment et un contexte favorables à la traduction cartographique de cette appréhension de la réalité urbaine. Mais ce n’est que plus tardivement, dans la deuxième moitié du siècle, que la carte intégra pleinement les outils utilisés pour organiser la ville en fonction de critères policiers, sans pour autant que les savoirs géographiques policiers irriguent toutes les pratiques des agents sur le terrain. L’opération la plus réussie fut sans doute la diffusion des informations policières sur l’espace parisien aux autres administrations et au public, ce qui permit à la Lieutenance de légitimer son action en montrant qu’elle maîtrisait la réalité chaotique de la plus grande ville du royaume. Pour ces raisons, les savoirs policiers sur la ville se situaient à un carrefour entre des savoirs géographiques qui appréhendaient l’espace lui-même, et des savoirs urbains qui ne le percevaient pas, ou l’envisageaient comme un décor. C’est donc bien le processus de bureaucratisation du travail policier qui permit de transformer ces expériences multiples en un savoir plus formalisé, normé et qui pouvait alors être diffusé et devenir l’instrument de maitrise du réel. De ce fait, la rationalisation du travail policier participa du processus d’enrichissement des savoirs sur l’espace sans pour autant prétendre à être un savoir géographique. 



Bibliographie



Chabaud G., avril-juin 1998, « Images de la ville et pratiques de la ville : le genre des guides de Paris (XVIIe-XVIIIe siècle) », RHMC, n° 45-2, p. 323-345.



Chabaud G., Cohen É., Coquery N., Penez J. (dir.), 2000, Les guides imprimés du XVIe au XXe siècle. Villes, paysages, voyages, Paris, Belin (703 p.)



Descimon, R. et Nagle, J., 1979, « Les quartiers de Paris du Moyen Âge au XVIIIe siècle. Évolution d’un espace plurifonctionnel », Annales ESC, XXXIV, p. 956-983.



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Milliot V. (dir.), 2005, Les Mémoires policiers, 1750-1850, Ecritures et pratiques policières du Siècle des Lumières au Second Empire, Rennes, PUR.



Milliot V., 2011, Un policier des Lumières. Suivi des mémoires de JCP Lenoir, Seyssel, Champ Vallon.



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Vidoni N, 2018, La police des Lumières, Paris, Perrin.



Sources



Archives Nationales



G7 704, projet de création des inspecteurs de police, juillet 1705.



H 2157 : affaires de Paris. 



Y 12526 : papiers du commissaire au Châtelet Dorival.



Archives de la Préfecture de Police



Lamoignon 27, fol. 838 r°, sentence de police du 10 septembre 1723.



Bibliothèque Historique de la Ville de Paris



CP 4725, « Affaires générales de la Police et de l’Hôtel de Ville de Paris en l’année 1753 », qui nous apprend que le quatrième bureau de la Lieutenance était entre autres consacré aux « voitures publiques ».



CP 4821



BnF



Arsenal



10141 : rapports de l’inspecteur Poussot. 



Manuscrits français 



8058, arrêt du Parlement du 7 février 1705 .



16847, mémoire pour la réformation de la police présenté au Conseil de police de 1666-1667. 



21681 : collection Delamare.



21684 : collection Delamare.



21688 : collection Delamare.



21695 : collection Delamare.



21710, mémoire de février 1707.



22387-22388 : collection Delamare.



Fond Joly de Fleury



1418, Édit du roi du mois d’octobre 1712, « servant de règlement entre les Officiers du Chastelet de Paris, & ceux du Bailliage du Palais ».



1425



Sources imprimées



DE FER, Nicolas, « Plan de Paris » en 4 feuilles, contenu dans L’Atlas curieux. Le monde dressé et dédié à Nosseigneurs les enfants de France, 1697.



De Fer, Nicolas, « Nouveau plan de Paris divisé en ses vingt quartiers », contenu dans L’Atlas curieux. Le monde dressé et dédié à Nosseigneurs les enfants de France, 1701.



Delamare, Nicolas, Traité de la police, t. I., Paris, J. & P. Cot, 1705.



DesnosPlan Général de la Ville et Faubourg de Paris. Divisé en ses ving quartiers. Par Desnos, Ingénieur Géographe pour les Globes et Sphères Ruë St Jacques, au Globe 1761, Paris, 1761.



DesnosPlan Général de la Ville et Faubourg de Paris. Divisé en ses ving quartiers. Par Desnos, Ingénieur Géographe pour les Globes et Sphères Ruë St Jacques, au Globe 1775, Paris, 1775.



DussausoyLe Citoyen désintéresséou diverses idées patriotiques, concernant quelques établissements et embellissemens utiles a la ville de Paris, & qui peuvent s’adapter aux autres Villes du Royaume, Paris, Gueffier, 1767



GuillauteMémoire pour la réformation de la police de France, Soumis au roi par M. Guillaute officier de Maréchaussée de l’Ile-de-France, illustré de 28 dessins de Gabriel de Saint-Aubin, Paris, Hermann, 1974.



JaillotRecherches critiques, historiques et topographiques sur la ville de Paris […] avec le plan de chaque quartier, Paris, Lottin, 1775, 5 t. ; Les rues et les environs de Paris avec un supplément aux nouvelles rues, Paris, Langlois, 1785



JèzeÉtat de Paris contenant sa distribution par quartiers : ses gouvernements Civil & Militaire : l’État ecclésiastique, ses institutions pour les Sciences & Arts Libéraux : la finance : le commerce : les manufactures, arts, & métiers : voitures publiques, &c., Paris, Claude Hérissant, 1757.



La Caille, Jean de, Description de la ville et des fauxbourgs de la Paris en vingt planches, dont chacune représente un des Vingt Quartiers suivant la division qui en a esté faite par la Déclaration du Roy du 12 Decembre 1702 renduë en execution de l’Edit du mois de Decembre 1701, Paris, Jean de La Caille, Imprimeur de la Police, 1714.



Le Guide parisien ou Alamanach des rues de Paris et de ses fauxbourgs, Paris, Langlois, 1785.



La Poix de Fréminville, Edme de, Dictionnaire ou Traité de la Police générale des Villes, Bourgs, Paroisses et Seigneuries de la campagne, Paris, Gissey, 1763



Le RougePlan des Halles couvertes et Incombustibles en l'Emplacement de l'hôtel de Soissons, 1763



Peuchet, Jacques, Encyclopédie MéthodiqueJurisprudence, t. IX, La Police et les Municipalités, Paris, Panckoucke, 1789.



 


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