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N°8 mai 2016 : Géographie historique et questions militaires (1):

Le Ciel Unique Européen : Quelle place pour l’aviation militaire française dans les 20 prochaines années ?

Alexandre Chauvel


Par Alexandre Chauvel (diplômé du Master 2 Géopolitique : enjeux territoriaux des rivalités de pouvoir, Institut Français de Géopolitique, Université Paris VIII)



Résumé : Le ciel unique européen, vaste projet civil de réforme de la circulation aérienne européenne, est un sujet méconnu, ne disposant pas de réelle couverture médiatique et étant peu étudié par le milieu universitaire. Pourtant, les enjeux liés à ces problématiques sont colossaux. En effet, alors que le ciel unique européen vise, entre autre, à améliorer la performance d’un trafic aérien engorgé et aux limites de ses capacités d’absorption, l’aviation militaire française peine à trouver sa place au sein du projet. Non concernée par les objectifs de rentabilité ou d’efficacité prônés par les compagnies aériennes, elle se voit même grandement gênée dans ses capacités d’entrainement par une augmentation fulgurante du trafic aérien et la perte progressive de ses zones d’entrainement.



Mots-clefs : Ciel Unique Européen, Aviation militaire, Aviation civile, Union-Européenne, Commission Européenne, Blocs d’espaces fonctionnels, SESAR, Eurocontrol, Agence Europe défense, Compagnies aériennes, Armée de l’air, Zones temporaires, Zones réservées, Circulation Aérienne, Contrôle aérien, Trafic aérien, Espace aérien, Souveraineté.



Abstracts : The Single European Sky (SES), big civil project of traffic management reform, is a unknown subject, without a real media coverage and being not much studied by academia. However, related issues to these questions are colossal. Indeed, while the Single European Sky have the objective to, among other, improve the performance of engorged air traffic and in the limits of his absorptive capacity, French Air force try with difficulties to find his place in this project. Not concerned by the economic and efficiency objectives of Airline company, French Air force is constrained in his training capacity by a rapid increase of air traffic and the progressively loss of his training zones and reserved area.



Word keys : Single European Sky, Military aviation, Civil Aviation, European Union, European Commission, Functional airspace block, SESAR, Eurocontrol, European Defense Agency, Airline company, Air force, Temporary Area, Reserved Area, Air Trafic Management, Airspace, Sovereignty.



Le ciel unique européen est un projet lancé par la commission européenne en 1999 avec comme objectif de rendre le trafic aérien plus efficace, compétitif, sécurisé et respectueux de l’environnement en supprimant les frontières nationales aériennes. Le transport aérien européen connait en effet depuis une vingtaine d’année un contexte économique et politique difficile : reformer ce secteur fragile et de plus en plus vulnérable à la concurrence extra-européenne paraissait être une évidence. La compétitivité du secteur de l'aviation de l'UE est une priorité puisque ce secteur emploie près de 2 millions de personnes dans l’Union-Européenne, et contribue à son économie à hauteur de 110 milliards d’euros. Le ciel unique européen repose sur quatre objectifs initiaux : diminuer le risque d’accident par 10, multiplier le trafic aérien par 3, diminuer les coûts d’exploitation par deux, et enfin, diminuer les émissions de CO2 de 10%. Ces objectifs ambitieux, définis dès le lancement du projet en 1999 par la Commission Européenne, sont à la hauteur du défi. L’aviation militaire française, n’étant pas directement concernée par cette course à l’efficacité et la rentabilité, cherche pourtant le moyen de continuer d’exister au milieu d’un trafic aérien civil toujours plus dense, sans pour autant perdre de sa capacité opérationnelle, ce qui constitue aujourd’hui une des préoccupations majeures des militaires. En effet, les zones militaires dans l’espace aérien français restent nombreuses et peuvent être à terme menacées. Alors qu’il apparaît difficile de concilier les impératifs économiques des acteurs civils aux impératifs stratégiques et opérationnels des acteurs militaires, quelle peut être la place de l’aviation militaire française au sein du ciel unique européen pour les 20 prochaines années ?



 



I/ Le ciel unique européen : à l’épreuve de l’Union-Européenne



A) Le volet législatif



Il faut remonter en 1999 pour trouver l’origine du ciel unique. L’été de cette même année fut frappé par de graves perturbations dans la gestion de l’espace aérien européen. En effet, dans un contexte général de croissance rapide du trafic aérien (quasi stagnant de 1975 à 1985, mais en progression soutenue de 5 à 12% dès 1985), cette période a vu la conjonction de plusieurs difficultés. Citons par exemple la mise en place d’un nouveau réseau de routes aériennes et de la fermeture partielle ou totale pour l’aviation civile d’une grande partie de l’espace aérien européen, notamment des Balkans, suite au conflit du Kosovo. Ce bouleversement de l’équilibre habituel des flux aériens européens a généré d’importants retards.



La Commission européenne en a conclu que les difficultés étaient attribuées au fractionnement des systèmes de contrôle aérien, lié aux frontières nationales, mais aussi à la présence de zones militaires trop nombreuses et peu perméables au trafic civil, et enfin à un certain manque de pouvoir de décision de l’institution européenne Eurocontrol. Dès lors, les mesures et propositions iraient dans ce sens, et l’aviation militaire se retrouvait inévitablement impliquée. Usant alors de son droit d’initiative, la Commission présente au conseil des ministres des transports des 9 et 10 décembre 1999 sa communication relative à la création d’un ciel unique européen. Elle fait alors un constat préoccupant sur la situation de l’espace aérien européen. L’extrême fragmentation de l’espace aérien européen en 28 systèmes nationaux entraine chaque année des surcoûts de l’ordre de 5 milliards d’euros aux compagnies aériennes et aux clients. Elle constate aussi que la distance moyenne de vols est augmentée de 42 kilomètres, et cela se répercute dans plusieurs domaines : une augmentation de la consommation de carburant, une augmentation des émissions néfastes à l’environnement, d’avantage de redevances plus coûteuses et des retards de plus en plus fréquents. En suivant les directives de la Commission, une telle évolution devait permettre une réorganisation complète de l’espace aérien et du réseau de routes.



On estime que près de 10% de carburant pourrait être économisé pour chaque trajet, les temps de vols seraient raccourcis, la sécurité et la protection de l’environnement augmentées, et le gain financier se situerait entre 2 et 3 milliards d’euros par an, sans compter la modernisation technologique avec le projet SESAR, qui ferait bénéficier l’industrie aéronautique européenne d’un avantage concurrentiel sur les marchés mondiaux. La refonte du système aérien européen paraît alors inévitable et indispensable, mais la tâche est immense. Pourtant, d’autres continents ont depuis longtemps adoptés des systèmes similaires et qui ont prouvé leur efficacité. Les Etats-Unis, par exemple, qui contrôlent un espace aérien de même taille, ont des coûts de gestion deux fois moins élevés, avec un trafic pourtant plus dense. Le système de contrôle européen gère deux fois moins de vols, avec trois fois plus de centres, pour un coût au vol deux fois supérieur. C’est ce que répète depuis plus de 10 ans la Commission européenne, en se servant de l’exemple américain comme véritable ‘vitrine’ du ciel unique, même si la comparaison a ses limites.



Dès la fin des années 2000, le premier « paquet » de règles et de mesures sont intégrés, définissant le cadre du projet. Pourtant, au bout de quelques années, les objectifs n’ont pas les résultats escomptés, et la Commission constate que cette première initiative n’est pas une franche réussit autant au niveau de la rentabilité que de l’efficacité globale du réseau aérien européen. Devant la nécessité imminente d’achever la création du ciel unique européen qui jusque-là avait trop tardé, le deuxième paquet, appelé Ciel Unique II, est adopté par la Commission en 2008. Celui-ci, plus étoffé et prenant en compte les nouvelles problématiques évoquées après les déceptions du précédent paquet, instaure de nouvelles mesures phares qui feront alors la réputation du ciel unique : le projet SESAR (Single European Sky ATM Research) et les Blocs d’espaces fonctionnels (FAB, en Anglais).



 



      B) Une redéfinition de l’espace aérien européen avec les blocs d’espaces fonctionnels (FAB)



Les Etats membres de la Communauté européenne ont engagé la restructuration de leur espace aérien avec comme objectif une gestion plus intégrée. Cette restructuration s’est concrétisée avec le concept de bloc d’espace fonctionnel : il s’agit d’un volume d’espace aérien défini en fonction des besoins du trafic aérien, et non des frontières des Etats. L’intérêt général l’emporte sur les ambitions personnelles. Ce concept, développé dans les différents règlements qui régissent le ciel unique, apparaît comme un des principaux moyens pour réduire la fragmentation de l’espace aérien. L’objectif des FAB est d’optimiser les flux aériens tout en augmentant l’efficacité des services de navigation en Europe. L'espace aérien de l'Union Européenne, actuellement divisé en 27 blocs nationaux, doit être divisé pour enfin passer en neuf blocs régionaux, visibles ci-dessous.



 



Document 1 : Les Blocs d'espaces fonctionnels en 2015





Le FAB qui nous intéresse plus particulièrement est le FABEC (Functional Airspace Block Europe Central, ou bloc fonctionnel d’espace aérien pour le centre de l’Europe). C’est aussi celui qui connaît le plus de difficultés. Il est aussi celui qui pèse le plus parmi les neufs autres cités précédemment. En effet, comprenant parmi les deux plus grandes puissances économiques de l’Europe, à savoir la France et l’Allemagne, sa position géographique au cœur du continent européen en fait un carrefour majeur de celui-ci, accueillant près de 6 millions de vols chaque année, soit 55%, la moitié de tout le trafic aérien européen. Cet espace aérien, d’un total de 1,7 Millions de km², se distingue des autres FAB par des trafics aériens, civils et militaires, étroitement entrelacés et des volumes en constante croissance, au-dessus de la moyenne des autres blocs. On estime qu’en 2018, le nombre de vols civils dans les six pays du FABEC devrait avoir crû de près de 50%. Pour toutes ces raisons, le FABEC constitue une pièce essentielle dans la future réorganisation de l’espace aérien et de la gestion du trafic aérien en Europe. Pourtant, plusieurs difficultés apparurent rapidement : il existe un réel déséquilibre entre les différentes FAB, notamment en termes de part du trafic aérien, dans la répartition des pays dans les blocs (certains ont une économie plus solide que d’autres), ou dans les objectifs à atteindre.



Document  2 : Les routes aériennes dans le FEBC





En observant la figure 2, nous constatons qu’un très grand nombre de routes aériennes se concentrent dans le FABEC. Nous remarquons aussi plusieurs points de concentration qui forment un « nœud » (ou hub, en anglais) international, à savoir les aéroports de Paris, Londres, Bruxelles, Amsterdam et Frankfort. Ce FABEC implique pour l’aviation militaire française une coopération civile-militaire fortement accrue. Un des premiers règlements du ciel unique européen, le 551/2004, relatif à l’organisation et l’utilisation de l’espace aérien, définissait déjà l’espace comme « un continuum qui n’est ni civil ni militaire », tout en introduisant une utilisation souple de l’espace aérien (FUA : Flexible Use of Airspace).



C) Un pilier technologique : le projet SESAR



Le projet SESAR (Single European Sky Air traffic management Research), « bras opérationnel » du ciel unique, est un programme technique visant à fournir à l’Europe des systèmes plus performants de gestion du trafic aérien afin de moderniser les systèmes actuels. De ce programme vont être développés de nouveaux systèmes, de nouveaux matériaux, de nouveaux équipements ou autres moyens techniques pour remplir les objectifs fixés par la Commission européenne pour le ciel unique européen. Plus qu’un simple projet, il est en réalité l’outil mettant en œuvre les ambitions du ciel unique, à la fois de façon matériel, technologique et industriel. Lancé une fois encore à  l’initiative de l’Union Européenne, le programme fût finalisé en 2004, pour être revisité en 2009.  Il trouve son originalité dans la volonté de pays membres de l’Union à coordonner les activités de recherche et de développement en matière de navigation aérienne. Soixante-dix organismes ou entreprises, soit environ 2 500 personnes, en Europe, travaillent directement sur celui-ci. Ce volet technologique est aussi un formidable espoir de croissance dans un secteur très concurrentiel et dans une Europe qui a subi de plein fouet les effets de la crise économique il y a 7 années. En effet, en 2011 l’organisme McKinsey, cabinet Américain de conseil auprès des Directions Générales des entreprises du monde entier à la réputation très sérieuse, avait fait des estimations sur les répercussions économiques d’un tel programme. Selon une étude du cabinet, entre 2013 et 2030, c’est un bénéfice de 419 milliards d’euros que le programme SESAR apportera aux membres de l’Union Européenne, soit 2% de croissance économique ainsi que 328.000 emplois créés (dont 42.000 rien que dans le secteur aérien) ce qui, dans un contexte particulièrement difficile comme celui que l’Europe connaît actuellement, est vu comme une véritable opportunité de soutenir l’économie du vieux continent. Toujours selon McKinsey, l’extrême fragmentation de l’espace aérien actuel coûterait l’équivalent de 1% de PIB, et tout retard sur le projet serait particulièrement préjudiciable : un retard de dix ans par exemple  amputerait les bénéfices de 268 milliards d'euros et créerait 189.000 emplois en moins.



Le programme SESAR se décompose en 3 phases distinctes et consécutives :



-       Une phase de définition (2004 – 2008) : posant les bases des travaux futurs, cette phase, concrétisée en mai 2008, fournissait un plan directeur du système européen de gestion du trafic aérien définissant le contenu, le développement et le déploiement des systèmes de prochaines générations et des futurs projets.



-       Une phase de développement (2008 – 2014) : cette étape doit produire la nouvelle génération de système, définie dans la phase précédente. Les industriels, tels qu’Airbus, EADS ou Thalès, devaient faire émerger des projets techniques pour ensuite les déployer. Les acteurs, tels que les compagnies aériennes, les centres de contrôle aérien ou l’aviation militaire sont financés afin qu’ils puissent s’équiper. Au départ, plus de 300 projets furent lancés et devaient être financés par le programme SESAR. Aujourd’hui, il n’en reste qu’environ 120. Ce programme touche aussi bien civils que militaires, puisque ces derniers n’ont d’autres choix que de s’équiper pour rentrer dans les normes et réglementations actuelles afin de pouvoir voler, et donc s’aligner sur les civils. On a évalué à 7 milliards le coût pour que les armées de l’air européennes s’équipent, et le coût est évalué à 1 milliard uniquement pour l’armée de l’air française ce qui, proportionnellement parlant, est énorme.



-       Une phase de déploiement (2015 – 2025 et au-delà) : C’est la production de masse de tous ces nouveaux systèmes étudiés et développés précédemment, mais aussi la mise en œuvre des nouvelles infrastructures de gestion de trafic.



A grande dominante civile, les militaires ne sont pas pour autant absents du programme. En effet, sur 10 000 vols où ont été employées les solutions innovantes du SESAR, 500 étaient des vols militaires. De plus, sur 80 experts militaires pour l’ensemble des pays membres (sur un total de 2500 experts), la France en fournit 27 ce qui, proportionnellement parlant, est une fois de plus important. Les experts militaires français participent à 21 des 300 (au départ) groupes de travail. Malgré plusieurs réticences, plusieurs domaines peuvent intéresser les militaires européens. Les industriels de l’aéronautique ont bien compris ces besoins spécifiques et de grands groupes comme Thalès ont travaillé abondamment sur le sujet. Citons par exemple la trajectoire 4D ou le système SWIM, deux projets emblématiques du SESAR.



En somme, le ciel unique repose sur trois axes principaux : une partie fixant la réglementation et le cadre juridique avec l’adoption de paquets législatifs, une deuxième partie redéfinissant l’espace aérien européen en regroupant les différents ciels nationaux en blocs, et enfin, le volet technologique du ciel unique, le SESAR.



 



II/ Une armée confrontée à des enjeux et problématiques civiles



A) Des décisions dictées par des impératifs économiques



En pleine crise économique, dans un secteur très concurrentiel et avec de grandes puissances émergentes telles qu’en Asie-pacifique, les compagnies européennes voient en ce projet l’occasion ou jamais de réduire leurs coûts à grande échelle tout en faisant face à l’inévitable augmentation du trafic pour rester performantes sur le marché mondial de l’aviation civile. L’armée de l’air ne se soucie pas de ces problématiques et n’a pas vocation à être rentable, puisque sa première préoccupation est la sauvegarde, la pleine maitrise et le maintien de la souveraineté du ciel français : ces différentes finalités, entrainant indéniablement des désaccords, sont une des principales difficultés pour l’armée française.



Le transport aérien mondial est en plein bouleversement. Ce dernier, très concurrentiel, se développe très rapidement et son trafic accroît de façon exponentielle dans presque tous les continents. En 2010, dans la zone d’Eurocontrol, le trafic en Europe était de 9,5 millions de vols, soit une croissance de 0,8 par rapport à l’année précédente, après un recul de 6,6% en 2009 lors de la crise économique de 2008. La reprise est donc visible, mais fragile. D’autant plus que d’autres régions du monde se développent rapidement : le taux d’accroissement du trafic dans la zone Asie-Pacifique par exemple est supérieur à celui de l’Europe et est en passe de devenir la deuxième du classement avant l’Amérique du Nord. Il est difficile de faire des estimations précises : le trafic chinois, relativement faible aujourd’hui, a un taux de croissance tel qu’il pourrait à lui seul modifier certaines prévisions. C’est pourquoi l’Europe doit à tout prix, avant cette échéance, optimiser son espace aérien de façon à rester compétitive malgré ce rapport défavorable. D’autant plus que de nombreux autres facteurs viennent fragiliser le secteur. Les frais d’entretien des appareils, les redevances aériennes, les taxes d’aéroport, le prix de matières premières tels que le baril de pétrole ou l’acier qui ne cessent d’augmenter sont autant de frais supplémentaires pour les compagnies.



Ces dernières ont beaucoup à gagner avec le programme SESAR, mais aussi l’Etat français car rappelons le, celui-ci est actionnaire de plusieurs compagnies. L’intérêt économique est donc aussi, d’une certaine façon, un intérêt national. Cela inquiète les acteurs civils, mais en parallèle, les militaires ne se sentent pas aussi concernés. La Défense Nationale s’abstrait de tous objectifs commerciaux, de rentabilité et par conséquent, est aux antipodes des enjeux économiques des compagnies aériennes et des industriels de l’aéronautique, même si l’armée de l’air a tout autant intérêt à parvenir à une meilleure utilisation de l’espace aérien que les utilisateurs civils. Leurs missions si singulières vont évidemment se confronter aux enjeux beaucoup plus pragmatiques des acteurs civils du secteur. Le budget de la Défense est sensiblement différent des autres ministères : l’exécution de celui-ci diffère dans le sens où il répond à des impératifs bien particuliers. Une grande partie de la problématique est là : l’armée de l’air, qui n’a aucune vocation à être rentable, se retrouve emportée dans l’élan d’un projet qu’elle ne désirait pas en premier lieu ou du moins, ne considérait pas comme une priorité absolue puisque si elle fait bien partie du trafic aérien européen et contribue à la sécurité de celui-ci, elle n’a pas de pouvoir décisionnel majeur en la matière. Pourtant, l’armée française et notamment l’armée de l’air connaît de nombreuses difficultés depuis plusieurs années, avec des moyens de plus en plus limités alors que les besoins n’ont jamais été aussi grands.



Le ciel unique européen contraint l’armée à s’équiper, et donc à investir des frais supplémentaires, alors que le renouvellement de ses équipements dans le cadre de la LPM est déjà très incertain et difficile. Même si la dernière loi de programmation militaire sanctuarise le budget de la Défense, la question budgétaire pour l’armée de l’air n’a jamais été aussi problématique qu’aujourd’hui. En somme, on demande à une armée déjà particulièrement éprouvée par des années de réformes et avec des moyens de plus en plus limités de s’impliquer d’avantage (comme par exemple dans des investissements demandés dans le cadre du SESAR) dans un projet aux problématiques majeures certes, mais d’ordre civiles. Objectifs de rentabilité, optimisation de l’espace aérien, modernisation du secteur : toutes ces problématiques ont plusieurs finalités, mais le facteur économique reste au cœur de toutes les attentions. Le fait est que les zones d’entrainement militaires sont en réalité un frein au développement économique (puisque tracer des routes aériennes les plus droites possibles fait partie des aspirations du ciel unique pour réduire les coûts, ce que empêche bien évidemment les zones d’entrainement militaires).



B) Des institutions politiques trop nombreuses et une lenteur administrative



Les considérations économiques sont nombreuses, mais les aspects politiques le sont aussi. L’essence même de ce projet est politique, les intérêts nationaux ou collectifs sont mis en avant et la multitude d’organismes civils ou militaires gérant l’espace aérien européen donne une dimension particulièrement complexe à cet ensemble. Les militaires sont confrontés à des institutions européennes servant elles l’intérêt général : cette différence de représentation est importante à prendre en compte. Les organismes, institutions ou les systèmes hiérarchiques civils ou militaires sont nombreux et alourdissent le processus décisionnel. L’échange d’informations est parfois fastidieux, notamment pour les militaires. Le ciel unique européen évolue sur trois niveaux hiérarchiques, à savoir : l’Europe, les FAB, et les Etats. Ainsi, une grande partie du processus décisionnel est entre les mains de Bruxelles, mais pour les militaires français, toute l’ambiguïté est là. En effet,  la Commission Européenne n’a pas vocation à réglementer l’aviation d’Etat : cela reste le rôle des Etats souverains et, pour la France, de la Direction de la sécurité aéronautique d’Etat (DSAE). La Convention de Chicago de 1947 relative à l’aviation civile qui confirme la souveraineté nationale en termes de réglementation aérienne empêche les institutions européennes d’imposer aux Etats des décisions en la matière. Il s’avère pourtant que Bruxelles surveille attentivement la bonne implication des pays dans le projet de ciel unique. Le décret d’application d’août 2014, qui fixe les champs de sanction pour les pays considérés comme n’ayant pas remplis les objectifs définis préalablement, est l’exemple concret que la Commission Européenne veille. Cette dernière dispose aujourd’hui des pouvoirs réglementaires nécessaires pour mettre en application les textes législatifs et trancher d’éventuels litiges. Elle est assistée dans sa mission par le Comité du Ciel Unique, composé de deux représentants de chaque Etat. C’est le véritable chef d’orchestre de la réforme.



L’objectif pour l’aviation militaire française est de créer une capacité commune. Le problème est identifié : ils ne sont pas suffisamment représentés à Bruxelles. Pour trouver leur place dans le ciel unique, les militaires devront trouver un représentant crédible au niveau européen, qu’il s’agisse d’une décision politique avec la création de nouvelles entités spécifiques, ou du renforcement d’une entité déjà existante en leur donnant plus de pouvoir ou de poids dans les décisions prises à Bruxelles. Pourtant, la tâche ne s’annonce pas aisée : la Commission Européenne doit alors entendre la voix de 28 armées différentes, avec autant de revendications et d’enjeux géopolitiques spécifiques à chaque pays. Les pays limitrophes de l’Union-Européenne (42 pays) doivent aussi être concertés puisqu’ils seront indirectement concernés par le projet. En somme, même si Bruxelles tend un jour à écouter les besoins et inquiétudes de chacune des armées concernées, il paraît impossible de parvenir à une situation qui arrangera tout le monde. Certains pays seront très peu ou pas impactés alors que d’autres devront consentir à d’importants sacrifices : le bien de tous passe par le sacrifice de certains Etats.



L’implication de l’Etat français dans le projet n’est toujours pas suffisante. Ce dernier est pourtant particulièrement concerné : des décisions prises dépendront de la capacité opérationnelle de l’aviation militaire française, du bon fonctionnement d’un secteur clé de l’économie française, et de la crédibilité même de la France au sein de l’Europe. L’Agence Europe Défense (AED) est aujourd’hui le seul représentant officieux auprès de la Commission Européenne pour l’armée de l’air française. L’AED, qui a été choisie comme porte-parole des armées, est la seule composante militaire reconnue à l’échelle européenne. Pourtant, son domaine de compétence est limité : crée en 2004, il s’agit d’un organe intergouvernemental, directement placé sous l’autorité du Conseil des ministres. Sa mission est de soutenir les Etats membres dans leurs efforts pour améliorer les capacités de défense de l’UE. Mais l’agence s’occupe principalement du matériel, en étroit rapport avec l’industrie de défense, en évaluant les besoins, les évolutions. Les militaires ne sont ainsi pas couverts par le champ de compétence de la Commission, qui s’étend bien au-delà des aspects uniquement matériels.



C) La préservation des zones d’entrainement militaires : des enjeux stratégiques et de souveraineté majeurs



Pour les tous acteurs de l’aviation civile, les zones d’entrainement militaires sont un véritable frein au développement du trafic aérien, un obstacle coûteux à franchir, à contourner. En effet, alors que le programme de ciel unique tend à tracer des routes de plus en plus droites, les zones d’entrainement militaires contraignent encore aujourd’hui les vols civils à prendre des itinéraires plus longs qu’ils ne le devraient. Pourtant, ces zones sont indispensables au bon maintien de la capacité opérationnelle de l’armée de l’air et, dans un sens plus large, à la souveraineté du pays.



Document 3 : Le partage de l'espace aérien français négocié entre civils et militaires en 2015





La réduction des menaces militaires en Europe, dans un contexte d’après-guerre froide après l’éclatement de l’URSS, peut justifier une certaine réorganisation de l’espace aérien européen. D’une manière générale, on constate que cette réorganisation se fait au profit de la circulation civile et aux dépens de la circulation militaire. Toutefois, les objectifs de rentabilité du ciel unique européen, certes salutaires pour l’économie européenne, ne sauraient être considérés comme prioritaires par rapport aux enjeux de sécurité et de souveraineté. Le ciel français n’échappe pas à cette réalité et son aéronautique d’Etat se trouve être particulièrement impactée. Ses zones d’entrainement, vitales pour maintenir sa capacité opérationnelle et garantir la souveraineté de l’espace aérien français, sont aujourd’hui considérées comme menacées. En 2014, la situation de l’armée de l’air française est caractérisée par une occupation moins importante de l’espace aérien français, mais aussi par une baisse de son activité, de son nombre de sorties et d’heures de vols, comme nous le confirme le bilan annuel 2014 de la DIRCAM. L’aviation militaire française possède aujourd’hui moins d’avions que dans le passé, ce qui se traduit évidemment par une diminution du nombre de vols, et donc moins d’occupation de l’espace aérien. L’aviation civile, elle, nous l’avons vu, connaît une croissance fulgurante. Le résultat est mathématique et se concrétise avec une utilisation dégressive des zones d’entrainement, au profit des vols civils. La perspective de voir disparaître petit à petit les zones d’entrainement militaires est « idéal » pour les acteurs civils, mais particulièrement préoccupant pour les militaires. Pourtant, rien n’est certain et il est impossible de dire aujourd’hui avec certitude ce qu’il va advenir de ces zones. Le véritable enjeu pour l’armée de l’air est de garder le pouvoir de dire non.



 



III/ Perspectives et recherches de solutions



A) Une coopération civilo-militaires accrue



La coopération civilo-militaire est, dans le projet de ciel unique européen, un concept fondamental. Partageant un même espace, les forces militaires et les acteurs civils doivent coopérer, échanger et communiquer en permanence pour trouver le meilleur terrain d’entente.



Cette coopération accrue passe dans un premier temps par le contrôle aérien. On a cherché à donner plus d’attributions et de moyens aux contrôleurs aériens militaires présents dans les centres de contrôle civils. Cette proposition a déjà fait ses preuves. Le mois de décembre 2013 vu la mise en service opérationnelle du premier centre militaire de coordination et de contrôle (CMCC) de type II, à Reims. Ce type de cellules existaient déjà depuis des années dans tous les centres de contrôle de l’hexagone, mais ils se sont vus progressivement bénéficier de plus de moyens dans le cadre du ciel unique européen, avec aujourd’hui plus de responsabilités. Leur mission première, consistant à notifier au chef de salle le déclenchement d’une opération de sureté aérienne et aider à l’identification des aéronefs, s’est vu valorisée par la création d’une nouvelle fonction, l’Officier de coordination contrôle défense (OCCD). En termes de gestion de l’espace, ce dernier devient un interlocuteur militaire direct pour le chef de salle. C’est lui, par exemple, qui peut aménager des zones d’entrainements au combat aérien réservées uniquement à l’activité militaire. Il participe aussi à une gestion souple de l’espace aérien puisqu’il peut désactiver temporairement une zone réservée afin de faire passer un vol civil, dans le cas d’une zone orageuse à contourner, par exemple. C’est une solution qui peut être envisagée et étendue à tous les centres de contrôles civilo-militaires : l’OCCD agira dans l’intérêt de tous, civils et militaires, mais sera surtout garant des besoins et des intérêts de l’armée de l’air.



Le contrôle aérien impose donc un échange constant des informations et des procédures opérationnelles entre services. Le concept de gestion de l’information (SWIM) que nous évoquions plus tôt va dans ce sens. Ce concept favorisera l’interopérabilité entre services de la navigation aérienne et pourra permettre aux militaires, par exemple, de fournir aux civils des informations sur les zones réservées ou interdites. Il pourra d’autant plus être utilisé à la fois dans un contexte civil avec le programme SESAR, et à la fois militaire avec le concept « Network Centric Warfare » (doctrine militaire démontrant la capacité de relier les différentes armées (terre, air, marine) entre elles en exploitant des systèmes d’informations). Pourtant, un tel concept permet aux usagers d’utiliser de façon aléatoire la portion d’information qui est applicable à leurs opérations respectives, et n’est réalisable que par le biais d’éléments techniques d’alimentation du réseau interopérables. C’est pourquoi les Etats et les organismes militaires doivent impérativement s’efforcer de définir des systèmes mutuellement utilisables par tous, et ce dès la phase de conception. Civils et militaires doivent travailler de concert sur une même base d’informations, même si la nature particulière des armées impose que certaines données restent classifiées pour des raisons de sécurité. Cette solution simplifierait d’avantage le travail de chacun. Mais pour cela, l’armée de l’air doit encore regarder parmi les 110 projets du programme SESAR lesquels choisir. En effet, les 2 milliards d’euros financés par le Conseil de l’Union Européenne pour les militaires doivent permettre à ces derniers de financer un certain nombre de projet. Actuellement, l’armée de l’air étudie encore ce panel d’inventions technologiques en cherchant lesquels répondraient à leurs besoins les plus urgents.



B) Vers une gestion plus souple de l’espace aérien français



L’espace aérien est, en théorie, partagé équitablement entre civils et militaires. Pourtant, après plusieurs années d’observations, force est de constater que ce partage présente des limites, et qu’une meilleure utilisation de cet espace doit être pensée conjointement entre les autorités civiles et militaires.



Principe de base dans la gestion de l’espace aérien, le concept FUA (Flexible Use of Airspace : Gestion souple de l’espace aérien) n’est pas nouveau. Il se caractérise par le fait que l’espace aérien ne peut être considéré en termes d’espace aérien militaire ou espace aérien civil, mais plutôt comme un continuum à utiliser de manière souple au jour le jour. Cette souplesse, négociée sur le moment, l’est directement au sein des centres de contrôle, en concertation entre le chef de salle et l’OCCD. En outre, cela signifie aussi que les éventuelles séparations requises de l’espace aérien ne doivent être que temporaires, et non permanentes. Ce concept est utilisé par les pays pour permettre aux deux types de circulation aérienne de cohabiter, à savoir à la Circulation Aérienne Générale (CAG) et la Circulation Aérienne Militaire (CAM). Du fait de l’imbrication extrême du trafic aérien en Europe, et plus particulièrement dans le FABEC, une gestion souple de l’espace aérien paraît indispensable. Le principe consiste à créer des « zones dans une zone. Utilisées intelligemment, l’activation ou la désactivation d’une dite zone permet d’agrandir ou de rétrécir le volume total, selon les besoins. Partant du principe que l’espace aérien est un espace en trois dimensions, ces zones sont découpées sur les plans latéraux, horizontaux et verticaux, formant ainsi des sous-volumes. Il existe donc une très grande flexibilité, pouvant répondre à de nombreuses situations. Notons que les militaires n’utilisent pas de façon permanente les zones d’entrainement pour leurs missions ; les civils, eux, ont un grand nombre de routes permanentes qui doivent parfois être détournées temporairement pour une raison ou une autre, par exemple pour contourner un phénomène météorologique. Cette utilisation souple de l’espace permet de répondre à un besoin immédiat et urgent, en conciliant les besoins de chacun. Cette optimisation de l’espace aérien fonctionne : pour preuve, depuis 2011, la création de zones aériennes temporaires est en constante augmentation.



C) Réaffirmer la place de l’aviation militaire française dans le ciel unique européen



Face au ciel unique et malgré les nombreuses difficultés qui persistent, les aviateurs français ont pris l’initiative en lançant plusieurs projets. Le projet « Unis pour faire Face » est le plus emblématique et ambitieux d’entre eux. Lancé en 2013, ce plan stratégique de l’armée de l’Air a pour ambition de fixer une feuille de route, améliorer et moderniser la capacité opérationnelle de l’armée de l’air. Cette initiative fixe donc un cadre et des objectifs à atteindre pour les années à venir et se divise en 4 axes d’efforts : moderniser les capacités de combat, simplifier les structures, développer les partenariats et valoriser l’aviateur. Le projet de ciel unique est mentionné et concerne directement deux des quatre volets : simplifier les structures et développer les partenariats. L’ambition est de redonner la place légitime de l’armée de l’air dans la réforme du ciel unique, comme véritable acteur à part entière et élément essentiel qu’il est impératif de prendre en compte, notamment de la part des acteurs civils.



A l’échelle européenne, le concept d’un ciel unique imposera à moyen terme que les forces militaires des différents Etats membres harmonisent non seulement leurs moyens techniques, mais aussi leurs procédures et leurs méthodes de travail. Les militaires ont aussi un intérêt certain à sensibiliser d’avantage les acteurs civils aux problématiques militaires, de questions de défense ou de souveraineté nationale. Auprès des institutions européennes, des compagnies aériennes ou des centres de contrôle, les aviateurs se doivent d’expliquer sans détours leurs préoccupations, prouver que la préservation de leurs zones d’entrainement est un enjeu majeur de souveraineté nationale, pourquoi leur liberté d’action et leur capacité opérationnelle peuvent être menacées, ou encore comment les impératifs économiques ne sauraient être prioritaires sur des questions de défense nationale.



Conclusion



Le ciel unique européen impose aux forces aériennes de s’adapter. L’armée de l’air française trouve difficilement sa place dans une réforme civile où les intérêts financiers, politiques ou de performances  dictent le débat. Civils et militaires partagent un même espace, mais avec des finalités différentes. Nous avons d’une part des aéronefs civils en perpétuelle augmentation et occupant de plus en plus l’espace aérien, avec des impératifs économiques les contraignant à emprunter les routes aériennes les plus courtes possibles, si besoin est en traversant des zones aériennes militaires. D’une autre part, nous avons l’aviation militaire avec une activité en baisse régulière et une occupation de plus en plus faible de l’espace aérien, alors que ces derniers ont pourtant besoin de s’entrainer quotidiennement dans des espaces suffisamment grands et à l’écart des flux aériens. En termes de proportion, les militaires ne représentent que 2% du trafic européen. Cependant, en zones physique, l’espace occupé est très important. Ces multiples zones constituent un obstacle majeur pour les flux aériens civils, et sont donc par conséquent menacées. Il est très difficile d’estimer aujourd’hui avec certitude ce qu’il adviendra de ces espaces réservés. Une vision à long terme est indispensable puisque les résultats ne seront visibles que dans le temps. Pourtant, d’une grande complexité, le ciel unique européen reste un sujet peu connu, peu étudié par les universitaires et les chercheurs.



Orientations bibliographiques :



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Boulanger P., 2006, Géographie militaire, France, Ellipses Marketing, 384 p.



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Lacoste Y., 2012, La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre, Paris, La découverte, 246 p.



Nicolas M., 2014, Enjeux d’appropriation de l’espace aérien en France et en Europe : vers une territorialisation spécifique, Thèse, France, Université d’Angers, 312 p.



Bilan annuel 2014, 2015, France, DIRCAM, 98 p.



La gestion de l’espace aérien, 2013, Paris, CICDE, (DIA-3.3.5), 54 p.



Rapport d’activité de la direction des services de la navigation aérienne, 2015, France,  DGAC, 56 p.



Transport aérien: menace sur les objectifs clés en matière de gestion du trafic aérien en Europe, 2012, Bruxelles, Commission européenne, 20 p.



Une Europe sûre dans un monde meilleur : stratégie européenne de sécurité, 2003, Bruxelles, Commission Européenne, 15 p.


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