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N°9 novembre 2016 : Géographie historique du Japon d'Edo et ses héritages:

L’uniformisation des productions agricoles à l’époque d’Edo : des savoirs géographiques biaisés à l’origine de crises

Nicolas BaumertYuki HataNobuhiro Ito


Par Nicolas Baumert (Université de Nagoya), Yuki Hata (Université de Nagoya), Nobuhiro Ito (Université de Nagoya)



Résumé : A partir de l’analyse d’ouvrages édités à l’attention des masses populaires, de listes de productions et de traités agricoles, l’article propose une lecture critique des politiques agricoles mises en œuvre au Japon entre le début du XVIIe siècle et la fin du XIXe siècle. Il apparaît qu’au cours de cette période le pays a encouragé une uniformisation des productions agricoles sur l’ensemble de son territoire suite à l’application de savoirs importés de la Chine des Ming (1368-1644). Or, la capitale de l’empire Ming (Nankin) était située dans une région où les conditions climatiques subtropicales humides correspondaient à celles de l’Ouest du Japon, mais certainement pas à celles du Nord-est où les effets des famines ont été paradoxalement amplifiés. Cette aberration géographique peut s’expliquer à la fois par la sociologie de l’élite politique et par l’importance des représentations alimentaires du Kansai dans l’ensemble de la société d’Edo.



Mots clefs : Japon, productions agricoles, famines, épidémies, époque d’Edo



Abstract: Using works published for a popular readership, lists of products and agricultural treaties, this article proposes a critic of the agricultural policies implemented in Japan from the early seventeenth century to the late nineteenth century. It appears that the country practiced at this time a standardized agricultural production throughout its territory following the application of a knowledge imported from Ming China (1368-1644). But the capital of the Ming Empire (Nanking) was located in a region of China where the subtropical climate conditions matched western Japan, but certainly not to the Northeast areas where the effects of famine were amplified. This geographical misunderstanding can be explained by the sociology of the Edo’s political elite and by the importance of Kansai’s food habits representations in the whole Edo society.



Keywords: Japan, agricultural productions, famines, diseases, Edo period



Le système géo-économique d’Edo avec les trois grandes mesures des Tokugawa (la création de la ville d’Edo, la fermeture du pays et le système des résidences alternées) marque profondément la géographie du Japon dans tous les domaines et la mise en valeur agricole du territoire ne fait pas exception. La croissance de la nouvelle capitale va développer sa propre centralité au Nord du pays et redéployer les efforts de mise en valeurs des terres et de défrichements vers le Kantō et le Tōhoku dont la population connaît une importante croissance. Mais, l’évolution de ces régions est extrêmement contrastée car elles sont aussi les provinces qui ont le plus été touchées par les famines et les épidémies.



Il est tentant de mettre en avant les aléas climatiques et le refroidissement général du XVIIIe siècle comme un facteur explicatif des famines et des disettes qu’ont pu connaître les régions les plus froides du Japon dans la seconde partie de l’époque d’Edo (Hayami A, 2001). Mais les efforts constants des autorités d’Edo et des seigneurs locaux pour améliorer les productions, se préparer aux famines auraient dû permettre de limiter les impacts. Il y a en effet eu pendant toute la période une réflexion importante sur ces questions matérialisée par de nombreuses publications. Les travaux ont porté sur le choix des espères, les techniques agricoles, les engrais et surtout les procédés de conservation avec une véritable volonté d’éducation à travers la publication d’ouvrages savants, d’images et de textes simplifiés pour toucher le plus grands nombre de personnes.



Pourquoi alors une vulnérabilité décuplée en particulier dans le Nord-est du pays ? L’uniformisation des productions est-elle responsable de cette situation ? Faut-il remettre en cause la pertinence des savoirs agricoles issus de la science mis en œuvre à cette époque ? Après s’être intéressé à la géographie contrastée des progrès de la période d’Edo (I) et à l’importance de la diffusion des savoirs chinois, autant auprès des élites que du peuple (II), nous nous demanderons si ce n’est pas l’organisation politique et culturelle du système Tokugawa qui est finalement responsable de ces savoirs géographiques biaisés à l’origine d’une vulnérabilité accrue (III).



 



I. Les progrès de la période d’Edo : une géographie contrastée



L’économie du Japon d’Edo est toujours basée sur le riz qui, malgré l’introduction du numéraire, reste l’étalon de la richesse des provinces et la rente de riz est ensuite échangée en argent par ses bénéficiaires. Les terres sont en gestion directe par le bakufu pour un bon quart (le plus fertile) et le reste distribué à des hommes-liges. Par exemple les provinces du Nord comme Dewa (aujourd’hui Akita) sont administrées directement par le bakufu d’Edo et leurs productions sont envoyées vers la capitale. Les seigneurs, maîtres sur leurs terres, éditent des lois propres à leurs domaines, concèdent des fiefs à leurs vassaux et lèvent des redevances sur leurs paysans. Sur le plan économique, leur autonomie est très marquée. Pendant l’ensemble de la période, ils ont encouragé les défrichements, se sont occupés de la gestion des eaux, ont créé des conditions favorables à la proto-industrie. La productivité des terres a fait de grands progrès, mais sans toutefois parvenir à empêcher les famines récurrentes.



A. Une augmentation générale des surfaces cultivées et des rendements



Sur les deux siècles et demi de la période le bilan apparaît plutôt positif. En observant l’évolution sur le temps long, le pays fait des progrès indéniables. Il y a eu une augmentation de la population, multipliée selon les historiens par un chiffre entre deux et trois, et pour la nourrir, des surfaces cultivées et des rendements. Au niveau de la population, le chiffre généralement admis est 10 à 12 millions d’habitants sur l’ensemble de l’archipel vers 1600 (1). Un siècle plus tard, grâce aux recensements effectués par le shōgun Yoshimune, les chiffres sont mieux connus et la population est estimée à environ 31 millions d’habitants (à titre de comparaison, en Europe sur la même période, la France, pays le plus peuplé, reste stable autour de  20 millions d’habitants). C’est une croissance importante aussi par rapport aux pays voisins comme la Chine et la Corée, mais qui s’explique aussi par le retour à la stabilité après les troubles qui avaient marqué le pays. Selon l’historien Guillaume Carré, le Japon était au début du XVIIe siècle un pays sous-peuplé, sous-administré et sous-développé sur le plan des infrastructures, dont la période de paix instaurée par le régime Tokugawa a permis le rattrapage économique et démographique (Carré, p. 662).



Pour nourrir cette population et pour accompagner la croissance des villes, une politique de défrichement et de drainage des terres est mise en œuvre. C’est surtout sous l’impulsion des cinq premiers shōgun, au cours du XVIIe siècle, que la plus grande partie des nouveaux terrains sont mis en culture. La plupart sont des rizières irriguées, ce qui permet aux prélèvements fiscaux de croître de façon corrélée. Pendant la première partie de la période d’Edo, il y a donc eu une augmentation de la productivité et des rendements dans l’ensemble de l’archipel. Défrichements, régulation des fleuves, terrassement, progrès du réseau d’irrigation et utilisation de moulins en sont la cause. Au cours du XVIIe siècle, les superficies sont en gros multipliées par deux. La production de riz, estimée à 18 millions de koku (2.7 millions de tonnes) vers 1600 passe à 25 millions (3.75 millions de tonnes vers 1700). La surface cultivée passe de 2 millions de chō à 3 millions entre le début du XVIIe siècle et la fin d’Edo en 1868 (Carré, op. cit.). Mais surtout la productivité globale augmente grâce à la généralisation de la double et de la triple culture annuelle permettant de ne pas laisser inoccupées des surfaces cultivables et d’y alterner, sans période creuse, les plantations de légumes ou de céréales.



Par rapport aux productions des XVe et XVIe siècles on note peu de différences. Outre le riz qui servait à l’impôt et à nourrir les villes en croissance, les cultures agricoles étaient principalement articulées autour des cultures irriguées destinées à produire un maximum de légumes à fort potentiel de conservation, la tendance étant de privilégier les productions utiles en période de sécheresse. Quelques produits nouveaux font néanmoins leur apparition et deux plantes apportées d’Amérique par les Européens à la fin du XVIe siècle s’ajoutent au répertoire des productions agricoles : la pomme de terre et le maïs (2). On observe également l’utilisation d’une variété de riz appartenant à la variété Indica (Ōkoshi, 2004, p. 125-133) appelée daitōmai. Il s’agit autant d’un riz destiné à être consommé cuit (uruchi-mai) que réservé à la fabrication de pâte de riz gluant (mochigome). La première occurrence du riz daitōmai se trouve dans les « Archives en cent volumes du temple Tōji » (Tōji hyakugō monjo) (Kuroda, 1983, vol. 1, p. 74) et on trouve ensuite des références à ce riz  au cours de l’époque d’Edo dans plusieurs ouvrages. Cette variété s’est généralisée à l’ensemble du Japon car peu impactée par les variations climatiques et poussant pratiquement sur tous les types de terrains, elle convenait parfaitement aux rizières nouvellement défrichées. Elle a été cultivée sur les terrains inondés en permanence dans les régions à faible pluviosité ou difficiles à irriguer, ou les terrains en altitude exposés au froid et facilement inondables lors des crues (Itō, 2014)



 



B. Une recrudescence des famines dans le Nord



Malgré des progrès indéniables, à partir de 1720, la croissance est plus lente et les recensements (dont le premier date de 1726) montrent une stagnation de la population. L’historiographie divise en général la période en deux avec une croissance lors d’un beau XVIIe siècle et un essoufflement et des crises à partir du milieu du XVIIIe siècle, et cela malgré les tentatives de réforme de la fin de la période. Dans la seconde partie de l’ère d’Edo, les disettes et les famines ont sévi à de nombreuses reprises, et l’essoufflement économique du système des Tokugawa a été aggravé par des aléas climatiques particulièrement importants.



La période d’Edo a connu quatre grandes famines extrêmement sévères au cours desquelles des témoignages historiques de cannibalismes sont attestés (Plutschow, 2006). Elles sont connues sous le nom d’Edo daikikin et portent le nom des ères durant lesquelles elles ont sévi : Kanhei (1642), Kyohō (1731-32), Tenmei (1782-1787) et Tenpō (1833-1839). L’ensemble du pays a été touché, mais la géographie des crises montre une différence assez marquée entre l’Est et l’Ouest, autant par le nombre de famines affectant ces régions que par la nature des aléas ayant provoqué les catastrophes.



A l’ouest du pays, l’année 1732 fut marquée par de longues pluies qui durèrent tout le sixième mois et provoquèrent une recrudescence anormale de sauterelles dans tout l’ouest du Japon, ce qui, ajoutée à la sécheresse qui suivit, engendra des récoltes catastrophiques. Cette année et la suivante connurent une grande famine qui fit de nombreuses victimes en particulier dans les fiefs du pourtour de la mer intérieure. On peut en deviner l’ampleur à partir des descriptions du Tokugawa jikki (Chroniques réelles des Tokugawa) qui indiquent dans l’article du premier mois de l’an 18 de l’ère Kyohō (1733), que le nombre de personnes décimées par la famine a atteint 960 990 victimes.



Mais, c’est le Nord-est du Japon qui a tout particulièrement été affecté. Trois des grandes famines de la période d’Edo (Kanhei, Tenmei et Tenpō), auxquelles on peut ajouter celle de l’ère Genroku (1699 et 1702), ont eu lieu dans cette région (voir figure 1). De 1755 à 1757, le Tōhoku a aussi été frappé par ce qu’on a appelé la grande famine de l’ère Hōreki, tandis qu’en 1783, les éruptions du volcan Asama (actuel département de Nagano) qui avaient commencé le quatrième mois de l’année et ont atteint leur paroxysme vers le septième mois, ont déréglé le climat avec des étés frais et de longs épisodes pluvieux jusqu’en 1788. Le résultat a été une grande famine qui toucha les régions du Tōhoku et du Kantō. Cette famine dite de l’ère Tenmei a, selon Sadanobu Matsudaira, conseiller en chef du shogunat à la fin du XVIIIe siècle, causé à Mutsu (actuels départements de Fukushima, Miyagi, Iwate et Aomori) 4400 morts soit environ 9% de la population et l’émigration de 1800 personnes.



L’historiographie a souligné un possible lien avec les changements climatiques du « petit âge glaciaire » dont les effets sont bien connus en Europe et dont des historiens comme Akira Hayami ont mis en évidence les conséquences. Les recherches de Hayami montrent que ce sont les régions les plus froides, celles de Est et du Nord qui furent les plus touchées (Mutsu, Kozuke, Shimotsuke, Hitachi). Des régions où les pertes de population sont aussi les plus importantes (Hayami, 2001). La conclusion de la corrélation évidente des régions où la culture du riz de la variété japonica est la plus fragile et des famines semble s’imposer. Mais ces régions, comme l’ensemble de l’archipel, ont bénéficié des apports des lettrés, des techniques agricoles et des techniques de conservation des aliments les plus en pointe du savoir de l’époque. Alors pourquoi rien n’a empêché la poursuite des crises dans le Nord, alors que l’introduction de la variété de riz daitomai et de tubercules venues d’Amérique aurait dû limiter leur vulnérabilité ? Ce point laisse penser que la réalité des mesures prises était parfois mal adaptée et il convient de s’interroger plus en détails sur la nature des savoirs agricoles mis en œuvre.



Document 1 : Les quatre grandes famines de l’ère d’Edo (Edo daikikin)





II Un modèle de mise en valeur agricole basé sur les savoirs chinois de la dynastie Ming (1368-1644)



Pour comprendre le choix de la mise en valeur agricoles de l’époque d’Edo, il faut se pencher sur les modalités de diffusion des savoirs savants et sur leur origine. Dans le système politique et culturel d’Edo, la Chine redevient un modèle de civilisation et le confucianisme de lettrés proche du pouvoir tels Ogyu Sorai (1666-1726) renforce cette tendance. Les confucianistes influencés par le modèle indépassable de l’antiquité chinoise prônent un ordre social strict sous le contrôle de légistes, seuls capables de décider de l’usage des matériaux naturels et humains d’une société. Sous l’influence de cette élite, la diffusion des savoirs agricoles s’est faite à destination des dirigeants autant que du peuple à l’aide d’ouvrages savants et de gravures illustrées dont les bases scientifiques venaient de la Chine des Ming (1368-1644). Nous allons prendre dans cette partie deux exemples, l’un concernant les traités agricoles et les traités de pharmacopée, l’autre concernant les images à destination du peuple pour lutter contre les maladies, afin de montrer l’influence ambiguë des savoirs chinois sur la société d’Edo.



A. Des ouvrages savants qui insistent sur les procédés de conservation des aliments et la lutte contre la sécheresse



A la suite des famines, nombreux sont les lettrés qui vont réfléchir aux moyens d’améliorer les rendements. Leur rôle sera proche de celui des physiocrates dans la France Moderne, avec une réflexion sur le choix des espèces, les techniques agricoles, les engrais et surtout les procédés de conservation. Aoki Konyō (1698-1769) conseiller du huitième shōgun encouragera ainsi la culture de la patate douce (satsuma imo) dans le Kantō. Ce sont surtout les ouvrages chinois de la période Ming  concernant les techniques agricoles et parvenus au Japon au cours du XVIIe siècle qui ont servi de base à une réflexion sur les moyens de bien gérer les provinces et également de lutter contre les famines sur l’ensemble du pays.



Plusieurs publications majeures marquent ce processus culturel. D’abord l’importation et la diffusion, au cours de l’ère Keinen (1596-1614), de l’ouvrage chinois Bencao gangmu (j. Honzō kōmoku, Traité exhaustif de pharmacopée).  Ce Traité médical du savant chinois Li Shizhen (j. Ri Jichō), riche en informations encyclopédiques sur de nombreux animaux et plantes, a eu fort retentissement dans le Japon du début de la période d’Edo et continuera à avoir une grande influence sur la vision japonaise de la science agricole jusqu’au milieu du XIXe siècle. Pour l’agriculture, on peut citer l’« Encyclopédie des techniques agricoles » (j. Nōsei zensho, c. Nongzheng quanshu), ouvrage compilé par Xu Guangqi (j. Jo Kōkei) au début du XVIIe et diffusé au Japon vers le milieu du siècle.



La caractéristique principale de l’époque d’Edo a été de réfléchir sur les procédés de conservation. C’est particulièrement le cas du Honchō shokkan  (Encyclopédie botanique de notre pays)  publié en 1695 qui met clairement en avant les procédés de conservation. L’ouvrage répertorie par exemple comme aliments à conserver pour les temps de famine le marron et la poire nashi et explique comment les conserver longtemps. L’« Encyclopédie agricole » (Nōgyōzensho), publiée en 1697 va dans le même sens, mais une lecture attentive de ses cahiers montre que très peu de mesures sont préconisées pour protéger les cultures contre le froid (Itō, 2014). Ces ouvrages, remarquables pour l’époque, comprenaient des illustrations précises des plantes, avec des explications écrites en syllabaire kana afin d’être compréhensibles également par les personnes ne sachant pas bien lire.



Le recensement botanique national ordonné par le shōgun Yoshimune et mené de 1735 à 1738 (Kyōhō 5 – Genbun 3) qui a abouti à la publication de l’« Inventaire des productions des diverses régions durant les ères Kyōhō et Genbun » (Kyōhō Genbun shokoku bussanchō) est un autre moment clef de la diffusion et de l’élaboration des savoirs. Cet inventaire, commandité afin de recenser les productions agricoles du pays, demandait à ce que les plantes et légumes soient représentés avec un dessin explicatif afin de faciliter la compréhension. Les illustrations de plantes, animaux et autres poissons et coquillages figurant dans ces carnets, ont été réalisés de manière scientifique et, dans certains cas, sont même en couleurs. L’Inventaire avait autant un but économique et politique que scientifique. Dans la logique de la politique d’autarcie décidée à partir de 1635, le développement des cultures spécialisées avait pour objectif de limiter les pertes d’or et d’argent résultant du commerce avec la Chine et la Corée en particulier pour des produits comme la cire, le papier, le coton ou le sucre. Egalement, il s’agissait de répertorier les plantes médicinales cultivables au Japon pour lutter contre les maladies.



Suite à la publication de l’Inventaire, on aurait pu penser que les recommandations en cas de famine se seraient appuyées sur les spécificités de chaque province. Ce ne fût pas le cas. Alors que les causes de famine pouvaient être la sécheresse, les insectes nuisibles, le manque d’exposition au soleil ou les dommages liés au froid, les productions agricoles promues par le bakufu sur l’ensemble du pays pour remédier au problème comptaient essentiellement des plantes résistantes à la sécheresse et aux insectes et à la conservation d’aliments permettant de faire la jonction avec les nouvelles récoltes. Ce choix s’explique par le fait que les ouvrages sur l’agriculture ont pour la plupart été inspirés par l’« Encyclopédie des techniques agricoles » qui ne détaillait presque que ces questions. Si les effets ont été relativement probants lors des périodes de sécheresse, puisqu’on avait l’habitude de dire que « la sécheresse n’amène pas la famine » (Itō, 2014), il en est résulté une vulnérabilité accrue des régions du Nord-est par rapport aux aléas du XVIIIe siècle dont les causes étaient justement la rigueur exceptionnelle du climat.



 



B. Des mesures de lutte contre les épidémies à l’intention du peuple qui révèlent l’uniformisation de l’alimentation quotidienne



Un autre exemple de l’influence majeure de la science chinoise dans les efforts des autorités d’Edo pour juguler les crises est la lutte contre les épidémies et l’information des populations via les vertus positives ou négatives des différents aliments. Nous prendrons ici le cas de la lutte contre la rougeole car la lutte contre cette maladie renseigne à la fois sur l’importance des mesures prises et sur les aliments réellement consommés au Japon à la fin de la période.



La rougeole était une des maladies qui faisait le plus peur, car elle affectait la croissance des enfants, et les contemporains la craignaient au même titre que la variole ou le choléra. Dans les Buko nenpyō (Chronologies de la région d’Edo), les épidémies de rougeole sont attestées dans la ville d’Edo au moins à 14 reprises entre 1616 et 1862 avec, en particulier les deux grandes épidémies survenues lors de la deuxième année de l’ère Genna (1616) et lors de la deuxième année de l’ère Bunkyu (1862). D’après le journal Fujioka-ya (3), le nombre de décès, dans toute la ville d’Edo pendant les 3 mois de l’épidémie de rougeole de 1862, qui a duré de juin à août, est de 14 210 personnes (Sudō et al., 1991, p. 398). Au vu du nombre de victimes, on comprend la volonté des autorités de réduire la diffusion de la maladie. Et encore une fois, c’est à partir des savoirs de la dynastie Ming que cette politique de santé publique va être menée.



Lors de la décennie 1860, des gravures en couleur de mesures préventives sur la rougeole, présentées sous la forme de planches contenant à la fois du texte et des images ont été produites à une fin éducative pour le peuple afin de limiter la gravité des épidémies. Il a donc d’une part été fabriqué beaucoup de copies de ces gravures (il en existe au moins 19 versions conservées), et d’autre part il a été décidé de publier par d’autres moyens, comme des livres, les informations de prévention à l’usage du peuple. L’association de l'image et du texte était considérée comme un bon moyen de communication pour la transmission des informations. Sur les images, les états d’avancée de la maladie étaient personnifiés et le texte les décrivait (Figure 2). La nourriture était souvent considérée comme un médicament et les méthodes de traitement montraient comment, au cours de l’année, il était possible, grâce à elle, de limiter la diffusion de la maladie en permettant au peuple de prendre soin de lui-même (Tomizawa, 2005).



Document 2 : Les précautions à prendre concernant la rougeole (Hashika kokoroe no zue)





Cette gravure intitulée Les précautions à prendre concernant la rougeole, date de 1862. Elle est conservée au Kokusai Nihonbunka kenkyu center. Le texte figurant derrière l’image comprend des références à 54 aliments quotidiens.



Ces images étaient un moyen de communication réalisé explicitement à des fins sociales permettant et elles contenaient des informations pratiques qui étaient confirmées par la connaissance médicale de l’époque, en particulier par le dictionnaire médical spécialisé de la fin de l’époque d’Edo Hashika yōjō (Remèdes pour la rougeole) (Katō, 2002). Une recherche sur les remèdes proposés montre que les informations concernant les soins sur la rougeole étaient à l’origine contenues dans les livres médicaux chinois de l’époque Ming et sont ensuite passées dans les ouvrages japonais sur la médecine de l'ère Edo (Suzuki, 2004, p. 539-540).



Il est difficile de se prononcer sur la réalité de l’efficacité de ces médications, mais la comparaison entre les différents ouvrages et leurs rééditions successives sont révélatrices de la foi accordée à la science chinoise lors de la période d’Edo. C’est ce que montre la comparaison de trois différentes versions de textes médicaux sur les propriétés de la nourriture : Le Waka shokumotsu honzō (Recueil de poèmes waka de médications alimentaires) édité en 1630, le Bankanichiyō eitaichōhōki takaragura (Trésors éternels et notes pratiques pour l’ensemble des foyers) où figure une partie intitulée « Notes médicales sur les propriétés des aliments (Shokomotsu honzōyōka) »  édité en 1823 et le Shokumotsu nōdokuhen (Notes médicales sur les poisons alimentaires) éditées en 1848 (Hata, 2011 et 2014). Nous présentons ci-dessous les résultats concernant les effets des carottes et de l’igname qui sont sans ambiguïté quant à la filiation entre ces textes.



 





D’après Hata (2014), traduit par N. Baumert



Les aliments cités concernaient des produits de consommation courante comme le taro, l’igname, les carottes ou le rhizome de lys, ce qui confirme bien les intentions des auteurs de toucher le plus grand nombre de sujets et de permettre au peuple une sorte d’automédication préventive en utilisant des produits de consommation courante dont les caractéristiques étaient connues. Mais l’intérêt principal de ces résultats est qu’ils sont aussi corrélés avec les produits cités dans les traités d’agriculture ou bien dans les gravures telles que le Nirvãna des fruits et légumes d’Itō Jakuchū (Voir Fig. 3), ce qui permet de comprendre que la production agricole alimentaire au cours de l’époque d’Edo s’est caractérisée par une tendance à l’uniformisation des cultures et que cette uniformisation touchait l’alimentation quotidienne des Japonais.



 



III L’organisation politique et culturelle du système Tokugawa responsable de l’uniformisation des productions ?



L’influence des savoirs chinois sur les élites qui ont essayé de lutter contre les famines et les épidémies ne fait pas de doute, et la conséquence a été l’uniformisation des produits de consommation courante. Des problèmes d’adaptation se sont posés car la capitale de l’empire Ming, Nankin, était située dans une région de la Chine où les conditions climatiques subtropicales humides correspondaient peu ou prou à celles de l’Ouest du Japon, mais certainement pas à celles du Nord-est ou de la chaîne alpine du centre du pays (voir figure 1). La sociologie de l’élite de la période permet de comprendre les causes de cette aberration géographique qui a paradoxalement renforcé la vulnérabilité d’une société paysanne qui peinait déjà à fournir du riz en quantité suffisante pour payer l’impôt.



A. Une uniformisation continue des productions de subsistance



La production agricole de la fin de la période d’Edo est relativement bien connue, puisqu’il existe des listes qui décrivent la production dans les 42 régions du Japon d’Edo. Pour le XVIIIe siècle, les « Cahiers des productions des provinces des époques Kyōhō et Genbun (Kyōhō genbun shokoku sanbutsu chō) » permettent de connaître les productions entre 1716 et 1741. L'examen des informations contenues dans ces listes de production fait apparaître parmi les aliments de base : les carottes, les haricots rouges (azuki), l’igname, le radis daikon et le tōgan (courge cireuse), mais également le sarrasin, le taro, la citrouille, le maïs et les poireaux. Les « Cahiers des productions » indiquent aussi dans les listes des produits transformés comme le kanpyō, le pain de blé (yakifu), l’umeboshi et le miso qui étaient tous des aliments courants de la mi-Edo. Leur indication sur les listes montre bien leur l’importance dans l’alimentation de l’époque (Morinaga et al. 1986).



A la fin d’Edo, une autre table, intitulé « Les spécialités de Naniwa (Naniwa miyage) », permet aussi de voir dans les classements notés en particulier « Recettes des légumes verts (Aomono ryōri no kondate) », « Nourritures populaires de la mer et de la terre (hōchō risankai ni tate sumō) », et « Accompagnements pour tous les jours (Nichiyō okasu mitake) », quels étaient les accompagnements (okazu) les plus utilisés dans la province qui correspond à l’actuel département d’Osaka. Dans les classements figurent quasiment les mêmes produits et une rubrique intitulée « Secrets de conservation des aliments au long de l’année » où il est question de méthodes de conservation par saumure de la fougère, des pousses de bambou, de l’aubergine ou du champignon matsutake.



On retrouve dans ces inventaires des variétés de légumes proches de ceux représentés dans une célèbre peinture à l’encre de Chine de l’époque d’Edo, le « Nirvãna des fruits et légumes » (Kaso nehanzu) d’Itō Jakuchū (1716-1800). La composition de cette œuvre représente un radis blanc (daikon) à deux branches, allongé sur un panier qui lui sert de couche et, tout autour de lui, divers fruits et légumes. Elle évoque d’une manière parodique les peintures du « Nirvãna de Śākyamuni » figurant le Bouddha au moment de son décès. 88 sortes de fruits et légumes représentatifs des productions du XVIIIe siècle peuvent y être identifiés (Figure 3) et cette peinture est un parfait témoignage des aliments consommés en complément des céréales pendant la période d’Edo.



Document 3 : Le « Nirvãna des fruits et légumes »



 





Rouleau (181.7 x 96.1 cm), réalisé par Itō Jakuchū. Musée National de Kyōto (tiré pour Ajia Yugaku, n°154, 2012, p. 93).



(Voir l’annexe 1 pour la liste des fruits et légumes représentés)



 



Ces données montrent que les fiefs cultivaient les principaux produits alimentaires cités dans les ouvrages savants d’agriculture et que les mêmes types de légumes étaient cultivés à travers le pays, preuve que des efforts d’uniformisation des cultures étaient menés à cette époque. Par exemple, parmi les aliments considérés comme bons dans les gravures sur la rougeole que nous avons précédemment cités, tous étaient produits dans l’ensemble des régions du Japon. Le taro était produit dans 38 régions sur 42 et plus étonnant lorsqu’on connaît la fragilité de ce légume, l’« Inventaire des époques Kyōhō et Genbun » répertorie près de 130 sortes de radis blanc.



 



B. L’importance de la sociologie d’Edo et des représentations alimentaires de l’Ouest du pays



La cause de cette uniformisation des productions ne peut uniquement s’expliquer par l’influence des lettrés et des savoirs chinois sur le pouvoir shogunal. En effet, les listes de productions attestant de l’uniformisation des cultures ne présentent pas de différences majeures entre les fiefs sous administration du bakufu et les autres. Si on pouvait penser que la gestion indépendante des fiefs aurait pu permettre une meilleure adaptation aux conditions locales, la réalité est tout autre. Il apparaît en fait dans le cercle dirigeant de la période d’Edo une uniformisation tout à fait étonnante des représentations géographiques et alimentaires. Cette uniformisation est d’autant plus remarquable que la ville d’Edo où se situait le pouvoir est à l’Est du pays, très au Nord par rapport au modèle chinois de Nankin de l’époque Ming, et que beaucoup de terres gérées directement par le bakufu se situaient dans le Tōhoku. Autant d’éléments qui auraient dû influer dans le sens d’une adaptation locale.



Le système des résidences alternées des seigneurs locaux (système dit sankin kotai) a eu une influence culturelle majeure sur l’ensemble de la société japonaise de l’époque d’Edo et il est certainement à l’origine de l’uniformisation des représentations géographique et alimentaire de l’élite. En effet, suite aux mesures du shōgun Iemitsu en 1635 et 1642, la plupart des seigneurs devait rester un an à la Cour du shōgun puis accomplir une année de service dans leur fief, pendant que leur famille restait en otage à Edo (4). Grâce à ces allers-retours les grands daimyō sont restés des administrateurs de leurs fiefs et il ne s’est pas développé le problème inhérent à toute société de Cour, où l’élite finit par devenir complétement coupée de son assise territoriale et perd son pouvoir et sa légitimité (5). Mais une uniformisation des comportements de l’élite est tout de même apparue. Les seigneurs de la période d’Edo ont donc encouragé des productions et utilisé des administrateurs dont les savoirs provenaient de l’élite shogunale dont l’éducation s’était faite à Edo selon les principes confucéens et par l’étude de la science chinoise.



Malgré la mise en valeur de terres nouvelles vers le Nord, l’imaginaire géographique d’un pays basé sur la richesse en riz n’a pratiquement pas évolué et est resté très proche de celui de l’époque antique. Cette rigidité du système a été particulièrement perverse pour la culture du riz daitōmai qui s’est poursuivie toute la période et qui était justement conseillée par tous les ouvrages d’agriculture entre les variétés à récolte précoce, normale et tardive pour les régions froides. Or cette variété était classée dans les « céréales diverses », et comme le riz utilisé pour s’acquitter de l’impôt était toujours la variété japonica, même si les paysans parvenaient à obtenir une récolte décente daitōmai, il fallait quand même l’échanger contre du riz japonica afin de payer les impôts, d’où une sensibilité accrue pour les régions du Nord en cas de mauvaise récolte à l’origine de cercles économiques vicieux sur les cours du riz.



Pour comprendre l’absence d’adaptation à la réalité des conditions climatiques du Kantō et du Tōhoku, il faut se rappeler que la création de la ville d’Edo était avant tout un choix politique visant à s’éloigner du berceau de la monarchie impériale situé dans le Kansai. Les dirigeants du bakufu avaient non seulement gardé des habitudes alimentaires proches de celles du Kansai (les importations de saké depuis cette région sont à ce titre un très bon exemple – Baumert, 2013), mais aussi une image des pratiques agricoles proche de ce qui était le cœur économique du pays. Pour développer leurs fiefs et lutter contre les crises, les activités traditionnellement pratiquées dans la région du Kansai, comme la construction de digues ou d’étangs d’irrigation, ainsi que la production agricole de plantes à fort potentiel de conservation à but de subsistance, constituaient l’une des priorités des politiques mises en œuvre par les seigneurs locaux, y compris dans le Nord.



 Ainsi, même après que le pouvoir politique soit passé de la région du Kansai (Ouest) à celle du Kantō (Est), le fait que le centre économique et principal producteur et fournisseur de productions alimentaires du pays reste le Kansai a probablement contribué à l’uniformisation des politiques agricoles dans l’ensemble du pays autant que la foi quasi mystique accordée à la science chinoise, car les représentations alimentaires des élites étaient elles-mêmes restées associées aux productions de l’Ouest. Les ouvrages agricoles savants sur les mesures à prendre pour prévenir les périodes de sécheresse ont donc renforcé ces représentations puisque leurs mesures correspondaient bien au climat de l’Ouest du pays. C’est ce qui explique pourquoi les fiefs du Kantō et du Tōhoku n’ont pas été capables de réagir correctement aux grandes famines comme par exemple celles des ères Hōreki et Tenmei (1755-1758) qui étaient dues au froid. Le fait d’avoir appliqué dans la région du Tōhoku les mêmes méthodes que celles utilisées dans le Kansai a finalement eu comme conséquence une impuissance des populations face aux famines dont l’origine était justement la fraîcheur exceptionnelle du climat.



Conclusion



Même si les progrès réalisés en matière agricole pendant les deux siècles et demi de la période d’Edo sont indéniables, l’uniformisation des productions et des mesures adoptées sous l’influence d’une science chinoise dont les conditions d’élaboration avaient été faites pour des milieux géographiques complétement différents a paradoxalement accentué la vulnérabilité des régions de l’Est et du Nord du Japon. Cette situation s’est développée malgré un inventaire précis des plantes cultivées dans l’ensemble du pays et malgré une véritable volonté de transmission des connaissances agricoles et de la pharmacopée, puisque de nombreux ouvrages détaillant les procédures à suivre en cas de famine ou d’épidémies furent publiés.



Il s’est ainsi développé dans une grande partie de la société de l’époque une vision erronée des savoirs géographiques qui a mis en évidence la faiblesse du système élaboré par les Tokugawa basé sur le riz impôt et la maîtrise de l’eau, mais aussi le manque de connaissance des lettrés japonais dans ce domaine spécifique de la mise en valeur agricole des territoires. Il est par ailleurs étonnant que les études hollandaises pourtant aussi développées n’aient pas tempéré cette vision qui s’appuyait quasi exclusivement sur la science venant de Chine. Les régions du Kantō et du Tōhoku sont donc restées vulnérables jusqu’à la fin de la période d’Edo où, suite autant à la fin des pesanteurs du système Tokugawa que de l’introduction de la science occidentale, elles ont pu développer leur agriculture au-delà des espérances, puisque la riziculture s’est étendue jusqu’à Hokkaido et que les régions du Nord sont aujourd’hui (pour des raisons tenant plus au type de propriété qu’au climat) les régions les plus productives du Japon.



 



Bibliographie



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Annexe 1





 


Nous avons indiqué par des * les fruits et légumes figurant également dans la liste des productions agricoles de la region de Yamashiro du Yôshû fushi, un traité de géographie locale composé par Kurokawa Dôyû et publié en 1686. Les ◎ signalent les fruits et légumes cultivés. 


Traduit du Japonais par Julien Faury


 


Notes : 


(1) Chiffre qui correspond à une estimation difficile. La population japonaise du début du XVIIe siècle est estimée autour de 12 millions (à plus ou moins 2 millions) à partir de données fragmentaires de registres de populations et l’estimation de la consommation de riz. A partir des recensements du XVIIIe siècle, les données sont beaucoup plus nombreuses mais il faut savoir qu’une frange flottante de la population n’est jamais comptabilisée. Voir Hayami (2001) pour une explication détaillée des estimations.



(2) Le maïs figure par exemple dans le tableau d’Itō Jakuchū (Fig. 3), tandis que les tubercules apparaissent souvent dans les textes sous le terme de « imo » (taro), ce qui ne permet pas de savoir précisément s’il s’agit de la pomme de terre (jagaimo) ou de la patate douce (satoimo).





(3) Le Fujiokaya nikki (Journal du Fujiokaya) est un célèbre journal du XIXe siècle tenu par un libraire d’Edo, Sudō Yoshizō, et couvrant les années 1804-1868. Il y a noté les évènements, les catastrophes, les rumeurs de la période.





(4) Selon les shōgun quelques adaptations au système des résidences alternées ont existé, pour des raisons exceptionnelles ou bien en raison de l’éloignement comme par exemple pour le fief de Matsumae à Ezo.





(5) Ce phénomène est très bien identifié par Alexis de Tocqueville pour le cas français (Tocqueville, 1952, p. 38-39). Il explique certainement aussi pourquoi le Japon n’a pas connu de révolution malgré un système à bien des égards beaucoup plus autoritaire que celui de la monarchie française.





 


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